Le rapport annuel sur l’état du climat en Afrique a été présenté ce mardi et mercredi par les Nations unies et l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Plus de 100 millions d’Africains sont directement menacés par le réchauffement climatique.
« 1,3 milliard de personnes restent extrêmement vulnérables, alors que l’Afrique se réchauffe davantage et à un rythme plus rapide que la moyenne mondiale », affirme le secrétaire général de l’Organisation météorologique mondiale (OMM). Un constat alarmant.
A l’occasion du point de presse, tenu à Genève, sur la présentation du nouveau rapport de l’ONU sur l’état du climat en Afrique, plusieurs intervenants ont expliqué pourquoi la catastrophe climatique touchera l’Afrique bien plus que le reste du monde. « Le changement climatique entraîne une augmentation de l’insécurité alimentaire, de la pauvreté et des populations déplacées en Afrique », assure la représentante de la commission de l’Union africaine (UA), Josefa Leonel Correia Sacko.
Le document, publié mardi par l’ONU et présenté mercredi par l’OMM et plusieurs responsables africains, a rappelé que les populations africaines restaient menacées par la crise socio-économique globale. Il met aussi en relief la responsabilité des 54 pays du continent, qui émettent moins de 4 % des gaz à effet de serre dans le monde.
Rappelons que le président du Groupe africain des négociateurs sur le changement climatique, Tanguy Gahouma, avait dénoncé le manquement des pays du G20, responsables de 80 % des émissions, à leur engagement de financer la lutte contre le réchauffement climatique en Afrique.
#StateofClimate in #Africa:
In 2020, approx 12% of all new displacements worldwide were in East and Horn of Africa region, with over 1.2 million new disaster-related displacements. #Floods and #storms were the main causes, followed by drought.
Details https://t.co/Z4xkhLlfaT pic.twitter.com/wN9IinUPOv— World Meteorological Organization (@WMO) October 19, 2021
L’Afrique vulnérable au réchauffement climatique
« D’ici 2030, on estime que jusqu’à 118 millions de personnes extrêmement pauvres seront exposées à la sécheresse, aux inondations et à la chaleur extrême en Afrique, si des mesures de réponse adéquates ne sont pas mises en place », déplore Josefa Sacko. Les personnes « extrêmement pauvres », selon la définition onusienne, sont celles qui vivent avec moins de 1,9 dollar par jour.
Sacko explique également que « d’ici 2050, en Afrique subsaharienne, le changement climatique fera baisser le PIB d’une moyenne de 3 % ». Le panel des spécialistes qui ont présenté le rapport de l’ONU a aussi insisté sur l’imprévisibilité du degré avec lequel ce contexte évoluera. Le secrétaire général de l’OMM, Petteri Taalas, a déclaré que « plusieurs indicateurs présagent que l’augmentation des températures en Afrique prend de l’élan ».
Notamment, les inondations, les glissements de terrain, la sécheresse, et le réchauffement des eaux. Selon le rapport, la tendance au réchauffement sur 30 ans de 1991 à 2020 était supérieure à celle de la période 1961-1990 dans toutes les régions d’Afrique. Aussi, le taux d’élévation du niveau de la mer le long des côtes tropicales et de l’Atlantique Sud, ainsi que le long de l’océan Indien, était supérieur à la moyenne mondiale.
Le rapport souligne également le rétrécissement des glaciers du mont Kilimandjaro, du mont Kenya et des montagnes Rwenzori en Ouganda comme symboles des changements rapides et généralisés à venir. « Leurs taux de retrait actuels sont supérieurs à la moyenne mondiale. Si cela continue, cela conduira à une déglaciation totale d’ici les années 2040 », prévient Taalas.
Et le Secrétaire général de l’OMM de continuer : « Le mont Kenya devrait être déglacé une décennie plus tôt (en 2030, ndlr), ce qui en fera l’une des premières chaînes de montagnes entières à perdre des glaciers en raison du changement climatique induit par les humains ».
Our new #StateofClimate in #Africa report shows that #climatechange is hitting Africa hard.
The African continent has warmed faster than the global average temperature.
But temperatures are only part of the story ….
Details https://t.co/EJqsTDIMTD#ClimateAction #COP26 pic.twitter.com/AByYc0UfN4— World Meteorological Organization (@WMO) October 19, 2021
Une injustice flagrante dans le traitement du problème
Quelles solutions à ces problèmes ? L’OMM, de son côté, appelle l’Afrique à « investir dans les infrastructures hydrométéorologiques et les systèmes d’alerte précoce ». Une ignorance feinte ? Car à l’approche de la COP26, l’enjeu immédiat est de pousser les pays pollueurs, qui sont aussi les plus grandes économies du monde, à respecter leurs engagements en Afrique.
Il faudra commencer par respecter l’engagement financier qui, depuis 2009, n’a toujours pas atteint le seuil annuel des 100 milliards de dollars promis par le G20. Là encore, cette somme est insuffisante à arrêter le réchauffement climatique en Afrique. Certes, elle aiderait à mettre en route certains projets comme la Grande muraille verte, à investir dans l’énergie propre, etc. Mais les engagements pris individuellement par les pays africains, vis-à-vis de leurs créanciers, resteront irréalisables, et mèneront indubitablement à un « nationalisme climatique ».
Certains pays africains industrialisés, comme l’Afrique du Sud, sont plus proches de la réalisation des projets dans l’énergie renouvelable, et comptent de moins en moins sur les combustibles fossiles pour les centrales électriques. D’autres pays, par contre, ont pris de tels engagements cette année, alors que leur impact carbone est minime, comme la Côte d’Ivoire, la Tunisie, le Mozambique et le Botswana.
Des deals politiques, sans doute, mais qui exacerbent l’impunité des pays du G20, qui trouvent dans la docilité des pays africains une aubaine pour l’industrialisation sauvage. Et alors que la COP26 se déroulera avec une présence africaine réduite, l’Afrique reste le continent le plus menacé.