Confrontée à un nouvel épisode de famine, l’île de Madagascar subit de plein fouet le réchauffement climatique. Le président malgache assure travailler dur, mais les résultats de sa politique sont difficilement visibles.
C’est presque une habitude. En 2016, 2019, puis 2020, Madagascar a dû faire face à des crises alimentaires récurrentes. Le président malgache, Andry Rajoelina, promet qu’il met tout en œuvre pour en vernir à bout et qu’il sera le président de la fin de la famine. « La volonté politique forte est une première à Madagascar, promet Lova Ranoromaro, directrice de cabinet du président de la République. Nous allons pouvoir mesurer les actions déjà menées d’ici six mois ». Mais derrière cette volonté politique se cache une réalité : la faim est bel et bien un souci sur l’île africaine. Et des images récentes — contestées par le gouvernement local — montrant des Malgaches consommant des lanières de cuir de zébu jetées par des cordonniers, montrent à quel point la situation est grave.
Une conjoncture qui inquiète au plus haut point. Dans un tweet, le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a déploré le fait que « des communautés entières dans le Sud de Madagascar sont confrontées à la famine ». Quelques jours plus tôt, le Programme alimentaire mondial (PAM) estimait que 400 000 personnes étaient exposées à un risque immédiat de famine, et que ce chiffre pouvait continuer à croître. « Si nous n’agissons pas au plus vite, le nombre de personnes confrontées à la famine atteindra 500 000 dans quelques mois », affirme le PAM, qui contredit ainsi l’optimisme des autorités malgaches. L’ONU, elle, s’inquiète que des personnes soient forcées de manger des criquets, des feuilles de cactus ou de la boue pour survivre.
Premier pays à subir le réchauffement climatique de la planète
A quoi est due cette nouvelle famine ? Madagascar est habituée à l’insécurité alimentaire, récurrente sur l’île. Mais pour les Nations unies, ce pays est le premier au monde à connaître une famine qui serait la conséquence du réchauffement de la planète. « Nous avons des gens au bord de la famine et il n’y a pas de conflit. Il y a juste le changement climatique avec ses pires effets qui les affecte gravement », affirmait il y a deux semaines la directrice régionale du PAM pour le sud de l’Afrique, pour qui « le pire est à venir ».
Alors que le gouvernement malgache crie haut et fort qu’il fait tout pour venir à bout de l’insécurité alimentaire, le PAM estime que c’est à la communauté internationale d’agir, de façon « rapide ». Pour l’organisation, les Malgaches « n’ont contribué en rien au changement climatique et ils en prennent l’entier fardeau à l’heure actuelle ». La semaine dernière, le patron de la Banque africaine de développement (BAD), Akinwumi Adesina, rappelait d’ailleurs que, « alors que l’Afrique émet moins de 4 % de l’ensemble des gaz à effet de serre, le continent en subit d’importants effets et est impacté plus que de raison ».
Quelles que soient les origines de la famine, il faut désormais agir, et vite. C’est dans le sud du pays que l’insécurité alimentaire est la plus importante. En mai dernier, l’ONU alertait sur les dangers d’une famine qui ne cessait de progresser et qui pouvait toucher jusqu’à un million de personnes. Reste que le gouvernement, pour ne pas voir son image sapée par les événements, s’en prend désormais aux journalistes qui montrent la misère dans le sud de l’île. Et malgré la volonté des autorités, l’échec est bel et bien là : Madagascar est en train de suivre les traces de l’Ethiopie dans les années 1980 et du Biafra quinze ans plus tôt, et d’accueillir l’une des plus grandes catastrophes humanitaires de ce siècle.