Un temps pressenti pour être candidat à la présidentielle ivoirienne de 2020, Tidjane Thiam vient de lancer un fonds d’investissement. Mais il garde un œil sur les prochaines échéances électorales…
Il a mis la politique entre parenthèses… en attendant le bon moment ? Un temps pressenti pour être le candidat du PDCI-RDA, le parti d’opposition en Côte d’Ivoire, Tidjane Thiam n’a finalement pas fait son retour à Abidjan l’année dernière, plus de deux décennies après avoir quitté son pays, comme l’imaginaient les observateurs. En interne, la rumeur de l’arrivée de l’ancien protégé de Henri Konan-Bédié avait provoqué des remous au sein du vieux parti. Poussé par sa famille — particulièrement sa sœur — à remettre un pied dans la politique ivoirienne, l’ancien ministre du Plan et du Développement s’était tenu éloigné des débats. Mais il avait attentivement observé sa courbe de popularité grandir.
A l’époque, le retour annoncé de l’ex-ministre de HKB avait agacé. « Tidjane Thiam a sa place au PDCI-RDA comme nous tous, comme tous les militants », estimait un des militants influents du parti, Basile Yao. Un coup dur pour les cadres, dont Jean-Louis Billon et Thierry Tanoh, qui voyaient d’un mauvais œil leur mise à l’écart des tractations entre leur président de parti et l’ancien banquier du Crédit Suisse. Quoi qu’il en soit, le PDCI-RDA ne s’est jamais officiellement étalé sur les relations qu’entretiennent son président et Thiam. Marc-Arthur Gaulithy, porte-parole de ce dernier, avait simplement affirmé que Tidjane Thiam avait « des contacts réguliers » avec Bédié.
Des ambitions politiques… pour 2025 ?
Mais a-t-il été question d’une candidature en 2020 ? Cela semble peu probable, Thiam ne faisant pas partie du bureau politique du PDCI-RDA. « Il n’est même pas militant », déplorait un cadre du parti à l’été 2020. Cependant, selon des proches du parti d’Houphouët-Boigny, le frère de Thiam, Abdel Aziz, qui est lui membre du PDCI, serait en charge de maintenir le contact avec HKB. Dans quel but ? En quête de rajeunissement, le PDCI-RDA se cherche un futur chef de file. Et ce n’est une surprise pour personne : malgré des critiques de Thiam vis-à-vis de Bédié, l’ex-banquier pourrait très bien être une bonne option pour la prochaine présidentielle. Et il pourrait mettre fin aux ambitions de certains cadres lorgnant sur le poste.
Eloigné de la scène politique depuis 1999, année lors de laquelle il a quitté la Côte d’Ivoire, Tidjane Thiam n’est jamais resté bien loin des dirigeants actuels. Egalement titulaire d’un passeport français, Thiam aurait même été proposé par Emmanuel Macron au poste de ministre français de l’Economie et des Finances. Cette double-nationalité pourrait d’ailleurs être un frein dans sa possible course à la présidence ivoirienne. Le fait qu’il ne se soit jamais relancé corps et âme dans la politique de son pays d’origine également. Car, aux yeux du public, Tidjane Thiam reste un simple technocrate. Un homme d’affaires qui vient d’ailleurs de lancer un fonds d’investissement, Freedom Acquisition.
Des contacts avec Bédié, Gbagbo et Ouattara
Ce profil est à double tranchant : si le PDCI-RDA et le RHDP d’Alassane Ouattara devaient, lors du nouveau mandat présidentiel qui vient de débuter, dialoguer et trouver un ministre d’union nationale, nul doute que le nom de Thiam reviendrait au centre des discussions. HKB et ADO avaient déjà évoqué une possible désignation de l’ex-ministre du Plan et du Développement comme candidat du parti unifié, lorsque les deux hommes étaient encore des alliés. Malgré son éloignement de la vie politique ivoirienne, Thiam reste donc une option sérieuse pour briguer un poste. Voire la présidence du PDCI-RDA ? Son nom revient en tout cas régulièrement dans les discussions, même si l’homme d’affaires doit aujourd’hui composer avec de nombreux ennemis au sein du parti d’opposition.
Pour arriver à ses fins, Thiam, qui ne cache plus ses ambitions, peut compter sur un allié de poids : ami proche de Jean-Luc Bédié, le fils aîné du président actuel du PDCI-RDA, Tidjane Thiam n’est pas réfractaire à l’idée de préparer sa candidature en 2025. Il s’était, lors de la campagne de 2020, dit favorable à un report du scrutin pour, disait-il, « sceller la réconciliation et la paix sociale ». Petit-neveu de Félix Houphouët-Boigny, Thiam a commencé, en coulisses, le travail. En contact régulier avec HKB, mais également avec Laurent Gbagbo, le patron du fonds Freedom Acquisition a en plus rencontré, en octobre dernier, la Première dame Dominique Ouattara à Paris. Au menu des discussions, il a été question d’un retour à Abidjan pour Tidjane Thiam. Courtisé par le PDCI-RDA et par le RHDP, il n’aura que l’embarras du choix s’il décide de revenir à la politique.