Depuis le temps de Boganda, personne n’a pu unir la République centrafricaine. La RCA est la Nation de toutes les guerres. Aujourd’hui plus qu’à n’importe quel moment, le peuple centrafricain souffre, dans l’indifférence générale.
Malgré des élections chaotiques et une victoire loin d’être nette, l’arrivée de Faustin-Archange Touadéra au pouvoir en Centrafrique était accompagnée de beaucoup d’espoir. Le programme du candidat s’appuyait sur un plan d’unité nationale inattendu, mais largement espéré.
Depuis son élection, le président a essayé. Avec un succès mitigé. Une paix, certes fragile, est venue s’installe pendant un an. En 2017, des combats entre des milices anti-Balaka et d’autres pro-musulmanes à Bria ont fait des dizaines de morts, souvent des civils, voire plus d’une centaine selon les Nations Unies. Les accords de paix s’enchainent, le premier à Rome à quelques heures de la catastrophe, suivi d’autres…
En février 2019, les principaux groupes armés de la RCA signent un accord de paix au Soudan. Sauf que, depuis trois mois, la situation s’est envenimée. Cette fois, il ne s’agit pas des groupes armés du Front populaire pour la renaissance de la Centrafrique qui se battent entre eux pour des considérations religieuses, mais de toutes les milices du pays qui se sont unies contre… l’Etat.
Une alliance spontanée ou l’effet Bozizé ?
La Mission des Nations unies en Centrafrique a essayé, depuis 6 ans, d’intervenir en faveur d’une paix durable, mais il semble que chaque nouvelle entité armée dans le pays attise le conflit. Les Casques bleus font maintenant partie d’une des deux coalitions principales qui se battent pour le contrôle de la RCA. Les Casques bleus se sont alliés avec des mercenaires russes de Wagner et des soldats rwandais pour protéger les institutions de l’Etat, majoritairement concentrées à Bangui.
Le mercredi 13 janvier, un groupe armé de la Coalition des patriotes pour le changement (CPC) a attaqué les banlieues de la capitale. Malgré leur échec, l’attaque était d’envergure : elle annonçait aussi une alliance originale, celle des groupes armés peuls, musulmans, chrétiens et autres. Clairement, les groupes armés les plus dangereux du pays se sont alliés contre l’Etat. Ces groupes contrôlent jusqu’à 60 % du territoire centrafricain.
On attribue les actes de violence depuis la fin des élections de décembre à François Bozizé, l’ancien président, au pouvoir entre 2003 et 2013. Cependant, les groupes armés nient avoir une quelconque allégeance politique et assurent que leur but est de « chasser les intrus et les politiciens corrompus »… D’où leur alliance.
Bangui, cité assiégée
Il est difficile de déchiffrer la confusion centrafricaine. Dix-sept factions armées majeures se partagent le territoire du pays et les actes de violence ont lieu chaque jour. Bangui, la capitale, vit dans la peur depuis la fin du scrutin présidentiel.
Des milliers de famille ont traversé la rivière Ubangi pour rejoindre la République du Congo ou la République démocratique du Congo.
Depuis que la coalition des Nations unies a repoussé l’attaque des rebelles de janvier, ces derniers bloquent les routes vers Bangui afin d’empêcher la nourriture et les médicaments d’y être acheminés. Beaucoup de produits de première nécessité sont en train de disparaître des marchés de la ville. La famine commence à s’installer malgré le protocole d’aide humanitaire appliqué depuis deux semaines. Bangui est une bombe à retardement.