Entre Félix Tshisekedi et Joseph Kabila, le duel politique touche à sa fin. Le président congolais actuel est-il vraiment le vainqueur de cette bataille qui a duré deux ans ?
C’est toute une famille politique qui vient de d’imploser. Pendant deux ans, Félix Tshisekedi a vécu dans l’ombre de Joseph Kabila, l’ancien président de République démocratique du Congo. Ce dernier a finalement été écarté du pouvoir après un jeu de coalitions qui pourrait laisser des traces. Après un accord avec Kabila, Tshisekedi était arrivé au pouvoir. Il avait dû, en échange, laisser le Front commun pour le Congo (FCC) de Joseph Kabila contrôler les deux tiers des sièges au Parlement, et ainsi former un gouvernement dans lequel sa propre formation était minoritaire.
Entre Kabila et Tshisekedi, c’est vraiment fini ?
Kabila avait joué un jeu pour le moins compliqué mais avait réussi à imposer ses propres règles, en s’octroyant un droit de regard sur la commission électorale, sur la Cour constitutionnelle, mais aussi sur l’armée et les services de renseignement. Depuis, Tshisekedi a œuvré en coulisse. Résultat : les députés FCC ont rejoint l’Union sacrée, la grande majorité présidentielle, et permis d’en finir avec le Premier ministre, qui était l’homme de Kabila, ainsi que le gouvernement. Le président du Sénat a finalement démissionné et Kabila semble désormais exclu du jeu politique. Mais lui aussi tente de renverser la tendance, multipliant les voyages diplomatiques.
Mais la bataille entre le président actuel et son prédécesseur est aussi une affaire qui pourrait arranger l’opposition. Le candidat malheureux de la dernière présidentielle, Martin Fayulu, peut-il tirer son épingle du jeu ? Au magazine Jeune Afrique, il assure qu’en réalité, il existe toujours un accord entre Kabila et Tshisekedi. « Ce qui se passe aujourd’hui est une illusion d’optique. Les personnes qui sont dans l’Union sacrée sont les mêmes que celles qui figuraient dans la coalition entre le FCC et Cach (Cap pour le changement). Ce sont des stratagèmes pour se maintenir au pouvoir ».
Kabila pas tout à fait hors-jeu
Méfiant, l’opposant laisse cependant le jeu politique se faire. Martin Fayulu vise en effet 2023. Et lui aussi s’active. Il profitent que ses adversaires de toujours soient en train de s’écharper en privé pour revenir sur le devant de la scène. Et Fayulu de proposer une réforme de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). Mais Martin Fayulu est encore plus ambitieux : il espère être le poil à gratter de ces prochaines années. Si le désaccord entre Kabila et Tshisekedi s’aggravait, Fayulu ferait tout pour lancer l’idée d’élections anticipées. En attendant, il se prépare au scrutin de 2023 en s’imaginant en arbitre qui profiterait d’un duel entre le président actuel de la RDC et son prédécesseur.
En attendant, s’il est bien un gagnant du duel entre Kabila et Tshisekedi, c’est bien ce dernier. Joseph Kabila s’est terré dans un silence inhabituel. Mais les experts politiques estiment que le calme qui règne ressemble à une stratégie. L’ancien président congolais ne veut pas envenimer la situation et se place ainsi en sage. Il n’est pas loin non plus de penser comme Martin Fayulu et d’envisager l’hypothèse d’élections anticipées. Enfin, si Félix Tshisekedi semble sortir vainqueur de ce duel, Kabila dispose toujours de nombreux soutiens. Et il sait que son successeur, s’il a désormais les mains un peu plus libres, continuera à se fixer des limites. Non, Kabila n’est pas définitivement hors-jeu.