Le président du Conseil de la Libye, Mohammed el-Menfi, sera en visite au Congo-Brazzaville les 15 et 16 juillet. Il s’entretiendra avec le président Denis Sassou N’Guesso.
Les 15 et 16 juillet prochains, le président du Conseil présidentiel en Libye, Mohammed el-Menfi, se déplacera au Congo-Brazzaville avec une délégation. Le chef de l’Etat congolais, qui préside le Comité de haut niveau de l’Union africaine (UA) sur la Libye, mène depuis plusieurs semaines une série d’actions diplomatiques pour le compte de l’Afrique, dans le délicat dossier libyen, dont cette visite ressemble au point d’orgue.
Dans une lettre de Denis Sassou N’Guesso adressée à Mohammed el-Menfi, que nous avons consultée, le chef de l’Etat congolais propose à ce dernier d’évoquer les solutions de la « restauration d’une paix durable dans (son) pays ». Après avoir appelé à une solution pacifique, le président congolais est passé à l’action diplomatique concrète. Pour promouvoir la souveraineté libyenne, « DSN » a récemment rencontré le leader politico-religieux Cheikh Farhat Jaâbiri, à Brazzaville, suite à l’intervention du président de l’homme d’affaires Jean-Yves Ollivier. Ce dernier serait actif dans le dossier libyen et aurait, selon nos informations, été à la manœuvre pour faciliter la venue du président du Conseil libyen à Brazzaville. Après ses déplacements à Paris, Ankara ou encore Tunis, el-Menfi sait que la réunion qui l’attend au Congo sera décisive.
Sassou N’Guesso pour une solution souveraine en Libye
Car Denis Sassou N’Guesso s’est placé comme l’une des rares voix africaines dans le dossier libyen. Après un sommet Berlin II qui a montré ses limites, la Libye sait aujourd’hui que son avenir passe par une solution africaine. Avec son homologue Mohammed el-Menfi, Denis Sassou N’Guesso devrait discuter de « la situation politique et sécuritaire en Libye », et donc des prochaines échéances électorales. Le président congolais a certains atouts dans la poche, dont notamment celui de pouvoir réunir les différentes parties autour d’un même objectif. El-Menfi, plutôt isolé, se verrait bien trouver un terrain d’entente avec les nombreux protagonistes de la scène politique libyenne. Or, le président congolais possède des contacts, parfois anciens, avec les hommes d’Etat du continent qui, unis, pourraient débloquer la situation sur place.
Pour une solution 100 % africaine
L’apparition de « DSN » aux côtés de Farhat Jaâbiri a montré aux dirigeants libyens que la diplomatie ibadite, généralement efficace, était relancée en Libye. Les présidents libyen et congolais devraient également rapidement tomber d’accord sur la nécessité d’agir pour le maintien de la paix dans la région, car la crise libyenne a de lourdes conséquences sur le Sahel, et plus particulièrement sur le Tchad. Le chef de l’Etat congolais a d’excellentes relations avec ses homologues sahéliens, et il espère pouvoir mettre en œuvre un plan de paix 100% africain sur ce dossier. Pour ce faire, el-Menfi aimerait écarter les ingérences étrangères, certains pays lorgnant d’ores et déjà sur la reconstructions de la Libye et sur de juteux contrats. La solution africaine apparaît donc comme la meilleure pour que Tripoli puisse conserver toute sa souveraineté.
Un message envoyé à la France et à l’Allemagne ?
Ce voyage au Congo revêt également un caractère très symbolique. S’il souhaite le départ des mercenaires turcs et russes de la Libye, el-Menfi ne porte pas la France dans son cœur. « Donnez-moi une chance de me rattraper », a imploré Emmanuel Macron lors du premier voyage du président libyen en mars dernier. Mais le chef de l’Etat libyen préfèrerait consolider ses relations avec ses voisins africains, comme le Tchad ou l’Algérie. Denis Sassou N’Guesso, en froid avec Paris, peut-il être la solution ? Dans le dossier du Tchad et de la Centrafrique, le président congolais a tué dans l’œuf la crise entre les deux pays, en réunissant Touadéra et Pahimi. L’expérience, l’ancienneté et l’aura continentale du président congolais sont des atouts, dont el-Menfi aimerait profiter. Car s’il veut tenir le calendrier électoral, le leader libyen doit aller vite et obtenir de l’aide des pays africains. « DSN » pourrait alors jouer un rôle important dans le but de trouver une solution continentale.
La nouvelle dynamique de Sassou N’Guesso
S’il préside le Comité de haut niveau de l’UA sur la Libye depuis plusieurs années, ce n’est que ces dernières semaines que le président congolais a lancé une grande offensive diplomatique dans ce dossier. Après quelques atermoiements, Denis Sassou N’Guesso a fini par prendre la mesure de la tâche qui lui incombait, en enchaînant les rencontres. Panafricain convaincu, « DSN » compte bien trouver une solution au nom du continent et damer le pion à Paris et Berlin. Le chef de l’Etat congolais a un autre atout : celui d’être moins malléable que certains autres chefs d’Etat africains, devenus les nouveaux amis de l’Elysée. A l’instar des présidents nigérien, tchadien ou togolais. Surtout, Sassou N’Guesso n’a plus rien à prouver sur le continent, où il est apprécié par ses homologues, et tentera de planter les drapeaux africains autour de la table des négociations.