La Cour de la justice de la Cedeao estime qu’interdire Twitter est un obstacle à l‘exercice de la liberté d’expression. Elle a été saisie par des ONG nigérianes après le choix de Muhammadu Buhari de suspendre l’accès au réseau social.
Dans l’affaire qui oppose Twitter au président nigérian, la Cedeao a décidé de prendre en main le dossier. Après avoir supprimé un tweet de Muhammadu Buhari, la plateforme de micro-blogging avait été suspendue au Nigeria. Le régulateur nigérian de la télévision et de la presse, la National Broadcasting Commission (NBC), a donc bloqué l’accès aux IP de Twitter. Le gouvernement a indiqué que le site américain était utilisé dans le but de porter atteinte à « l’existence sociale du Nigéria ». Le Nigeria a-t-il ainsi enfreint l’article 9 du Protocole additionnel relatif à la Cour de justice de la Cedeao ?
Après cette suspension de Twitter au Nigeria, un collectif d’organisations de la société civile a porté plainte au Nigeria. Ce collectif reproche aux autorités du Nigeria d’avoir suspendu le réseau social mais également d’avoir menacé de poursuites les utilisateurs. Dans un communiqué, le ministre de la Justice, Abubakar Malami, avait en effet indiqué qu’il allait « ordonner la poursuite immédiate des contrevenants à l’interdiction par le gouvernement fédéral des activités de Twitter au Nigeria ».
Alors que la NBC comptait revoir « le processus d’octroi de licences à tous les services de diffusion en continu sur Internet (OTT) et aux médias sociaux au Nigeria », Amnesty International Nigeria a estimé que « cette action est clairement incohérente et incompatible avec les obligations internationales du Nigeria. Nous demandons aux autorités nigérianes de revenir immédiatement sur cette suspension illégale et sur les autres projets visant à bâillonner les médias, à réprimer l’espace civique et à porter atteinte aux droits fondamentaux des Nigérians ».
L’affaire est loin d’être finie
Saisie par le collectif d’organisations de la société civile, la Cour de justice de la Cedeao a, le 22 juin dernier, ordonné au Nigeria de mettre fin aux sanctions contre les personnes utilisant Twitter. « L’accès à Twitter fournit une plateforme pour l’exercice de la liberté d’expression et toute interférence avec l’accès sera considérée comme une atteinte à la liberté d’expression », indique le jugement. La Cour de justice de la Cedeao a par ailleurs estimé avoir la compétence de décider si le Nigeria avait ou non transgressé les règles, se plaçant ainsi au-dessus des lois nigérianes.
Reste désormais à savoir quelle sera la position du gouvernement du Nigeria. Mardi dernier, le ministre de l’Information et de la Culture, Lai Mohamed, parlait devant les parlementaires. Il défendait alors la position du président face à des députés partagés. Le gouvernement a décidé de constituer une commission qui doit entamer des négociations avec Twitter.
La Cour de justice de la Cedeao, elle, s’est donc déclarée compétente, mais l’affaire est loin d’être finie. Des audiences ont été fixées à une date ultérieure, et le Nigeria pourra tenter de défendre sa décision de suspendre Twitter.