Le Cameroun a mis en place une taxe sur les transactions électroniques. De quoi remplir les caisses de l’Etat mais également provoquer la colère des usagers du mobile money.
Orange Money, MTN MoMo… Si la guerre des tarifs fait rage, pour les opérateurs proposant des transferts et retraits d’argent en mobile money, l’Etat camerounais vient d’ajouter son grain de sel. Car depuis le 1er janvier dernier, une taxe de 0,2 % a été mise en place sur les transactions électroniques.
Si le montant de la taxe semble minime, ce qu’elle pourrait rapporter à l’Etat n’est pas négligeable… En effet, en 2020, ce sont plus de 10 000 milliards de francs CFA qui ont transité entre les différents utilisateurs camerounais. Le marché est monopolisé par deux opérateurs : MTN et Orange. Le groupe français détiendrait 70% de parts de marché.
Une mesure en catimini
Mais comment le gouvernement a-t-il réussi à imposer cette taxe ? Selon les observateurs, la mesure a été passée en catimini, au beau milieu de la loi de finances 2022. « La loi a été signée le 16 décembre, une semaine avant Noël, et la mesure sur la taxation se cache au milieu d’un texte de 72 pages », indique Rebecca Enonchong, dirigeante de la société AppsTech, citée par Jeune Afrique.
Comme elle, plusieurs internautes ont lancé le hashtag #EndMobileMoneyTax. Il s’agit de dénoncer la taxe sur le mobile money, mais pas seulement. En effet, estime Rebecca Enonchong sur Twitter, « cette loi concerne tous les transferts qui laissent des traces électroniques à part les virements bancaires et les paiements d’impôts ». Un texte qui « concerne donc aussi Express Union, Western Union, etc. », résume la spécialiste tech.
Sur Twitter, les espaces audio se multiplient pour tenter d’expliquer l’aberration que représente cette taxe de 0,2 %.
Hier dans le #EndMobileMoneyTax space, nous avons eu le consensus que la taxe là est BS et qu’on devrait mieux utiliser les fonds actuels..voici donc qq exemples concrets tirés du budget 2022 cad en dehors de l’argent de la SNH que personne ne maitrise…
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— Remi Tassing (@tassingremi) January 4, 2022
Une taxe qui doit permettre de renflouer les caisses publiques. Les ennemis de celle-ci estiment qu’il s’agit d’une « taxe contre les pauvres ». Effectivement, les Camerounais les plus pauvres, pas forcément bancarisés, seront taxés là où les utilisateurs de chèques, de virements ou de cash ne le seront pas. Il s’agit également d’une taxe contre « l’innovation », assure Rebecca Enonchong.
Mobile money est juste un mode de paiement.
Il n’y pas de taxe si je paye par chèque.
Pas de taxe si je paye par cash.
Il n’y a pas de taxe si je paye par virement bancaire.
C’est une taxe contre l’innovation.
C’est une taxe contre les pauvres. #EndMobileMoneyTax#WeSayNo— Rebecca Enonchong (@africatechie) January 2, 2022
Le Ghana veut aussi sa taxe
Pour le moment, les opérateurs ont simplement décidé de tenir informés leurs clients de l’existence de cette taxe. D’autres opérateurs tentent donc d’en profiter pour attirer des clients, comme Camtel pour le mobile money, Express Union Finance ou EMI Money, une agence de transferts d’argent. Quand les uns promettent de prendre eux-mêmes la taxe en charge, d’autres proposent des grilles tarifaires plus abordables.
Reste que la taxe devrait, au moins en janvier, être appliquée, les opposants à cette mesure n’ayant pas réussi à discuter avec les autorités gouvernementales. D’autres pays, comme le Ghana, indique Jeune Afrique, devraient également plancher sur une telle mesure. Une taxe de 1,75 % sur les paiements, transferts de fonds, virements bancaires et paiement marchands électroniques a été évoquée.
Mais contrairement au Cameroun, cette taxe, si elle voit le jour en février, comme prévu, devrait être destinée aux classes moyennes : en-dessous de 100 cédis, soit près de 15 euros, la taxe ne devrait en effet pas être appliquée.