Au Burkina Faso, les autorités ont interdit les manifestations prévues à Ouagadougou samedi. Le mouvement organisateur « Sauvons le Burkina » compte bien aller à l’encontre de la décision de la mairie.
Jugeant illégal le mouvement « Sauvons le Burkina », la mairie de Ouagadougou a interdit les manifestations prévues ce samedi 22 janvier. Le collectif, qui avait lancé les marches exigeant la démission du président Roch Marc Christian Kaboré en novembre dernier, s’oppose à la décision du maire.
« Nous sortons pour interpeller sur la situation sécuritaire dans notre pays. Nous sommes en concertation. Un huissier va constater et on va aller en référé », a déclaré la porte-parole du mouvement, Korotoumou Drabo. Mais l’activiste annonce également que les manifestations auront lieu quoi qu’il en soit : « Nous sortons de façon pacifique. Nous n’avons pas besoin de casser. Avec cette interdiction de la mairie, est-ce que cela nous en empêchera ? »
L’interdiction de ces manifestations est-elle politique ? La mairie déplore que « la lettre d’information (du mouvement) n’était pas accompagnée d’un récépissé de reconnaissance d’existence légale ». Mais de son côté, le secrétaire municipal, Christian Charles Rouamba, indique aux médias que les manifestations ont été interdites pour « des raisons de sécurité ».
Manifestations interdites tous azimuts
Sauvons le Burkina avait organisé une autre manifestation fin novembre 2021. Une manifestation également interdite par la mairie, mais qui a tout de même eu lieu et qui a causé des heurts entre les forces de l’ordre et les manifestants.
Ces derniers ont vu leurs rassemblements bombardés de gaz lacrymogènes et chargés par les matraques des policiers et soldats. Une dizaine de manifestants ont été blessés. Le mouvement dénonce la disparition de plusieurs de ses membres le 27 novembre dernier, qui pourraient, selon leurs proches, être détenus par les forces de l’ordre.
La manifestation de novembre avait pour but de dénoncer l’échec du gouvernement de Marc Christian Kaboré dans la lutte contre le terrorisme, et exigeait sa démission. Depuis, le président burkinabé a changé de nombreux ministres, dont le Premier ministre, et les ministres de la Défense et de l’Intérieur.
Une autre manifestation, prévue demain également, a été interdite. Celle-là était organisée par la Coalition des patriotes africains-Burkina Faso (COPA/BF) et visait à exprimer un soutien au Mali voisin. Deux responsables de la COPA/BF, qui avaient convoqué le rassemblement, ont été arrêtés jeudi.
Crise de confiance
En raison de la détérioration de la situation sécuritaire, le président du Burkina Faso est dans l’œil du cyclone depuis des mois. Mais ce sont surtout ses positions diplomatiques et politiques qui ont créé un fossé entre lui et la jeunesse de son pays. Le soutien de Kaboré aux sanctions de la Cedeao visant le Mali, mais aussi l’arrestation de huit soldats, accusés de tentative de coup d’Etat, plus tôt en janvier, n’ont pas aidé le chef de l’Etat à être populaire.
On se souvient également que plusieurs civils sont morts lors du passage du convoi de Barkhane aux alentours de Ouagadougou en novembre dernier. Pendant ce temps, les soldats burkinabés protégeaient les militaires français. Et alors que les attentats terroristes prouvaient l’incapacité de l’Etat à assurer la sécurité des citoyens, Kaboré trouvait des boucs-émissaires pour ses présumés échecs.
Une crise de confiance, donc, qui ne risque pas de se régler alors que les tensions entre pouvoir et société civile augmentent jour après jour. L’interdiction des manifestations, elle, laisse prévoir de nouveaux heurts ce samedi 22 janvier.