Considéré par tous comme le tyran le plus sanguinaire de l’histoire de l’Ouganda, et peut-être même de l’Afrique, Idi Amin Dada est encore aujourd’hui une marque indélébile dans la mémoire des centaines de milliers d’orphelins ougandais.
Idi Amin Dada était le troisième président de l’Ouganda. Sa dictature s’est étendue entre 1971 et 1979. Sa montée au pouvoir était analogue à un contexte de tensions ethniques graves, de la fin de la colonisation britannique. Il est encore aujourd’hui l’un des chefs d’Etats les plus polémique de l’histoire africaine. Pourtant, si l’on pense que rien ne l’avait prédestiné à massacrer 370 000 personnes, on fait fausse route, en rétrospective.
Fils de « nervi » de la police ougandaise, et issu de l’aristocratie Lugbara du côté de sa mère, Idi grandit dans une famille superstitieuse. Ce fétichisme influença sa psyché d’enfant plus que sa formation à l’école coranique n’éduqua sa pensée. Cela n’empêche qu’à cet âge, Idi maitrisait déjà trois langues malgré la précarité dans laquelle il grandit.
C’était surtout son intelligence, son physique intimidant et sa cruauté qui propulsèrent sa carrière militaire dans le régiment colonial britannique entre 1946 et 1960. Athlète accompli, stratège militaire, diplomate et terriblement charismatique, il menait son régiment d’une main de fer et faisait figure de meneur plus que de supérieur. En 1960 il était l’un des deux seuls Ougandais à atteindre un rang d’officier.
Sa campagne dans l’Est de l’Ouganda est restée dans les annales. Il a torturé, exécuté, négocié et menacé sur son chemin vers l’Est à la tête d’un escadron de commandos. Capitaine Idi a, presque seul, radouci les guerres tribales d’une partie du pays. Ce qui lui a valu l’intérêt de Milton Obote, qui devint Premier ministre après l’indépendance en 1962.
Les graines de folie de Big Daddy
Obote et Idi Amin Dada ont éventuellement renversé le président Mutesa II. Après quelques mois, Idi se proclame chef de l’état-major de l’armée et commence une campagne de recrutement militaire dont le critère principal était l’ethnie des candidats. Toutefois, pour l’Ouganda en 1966, Idi était celui qui les avait libérés des siècles du règne bantou. Le président Mutesa était aussi roi de Buganda, donc de « l’élite » des Bantous d’Ouganda. Amin Dada a recruté des soldats qui l’estimaient pour sa descendance Lugbara, ainsi que des immigrés soudanais qui le voyaient comme un chef moderne et un musulman pieux à la fois.
En 1970, il assassina son garde-fou, le général Pierino Okoya. Et un an plus tard, alors qu’Obote était à Singapour, il organisa le coup d’Etat qui le mit à la tête du pays, en 1971. Aidé par les rebelles rwandais, avec lesquels il parvint à obtenir le contrôle absolu du pays. Au départ, le président dictateur Idi Amin Dada était bien accueilli par certains pays comme la Grande-Bretagne et Israël. Cependant, les liens avec ce dernier sont alors interrompus en raison de la sympathie annoncée d’Amin Dada pour l’extermination des juifs dans les camps nazis. Malgré tout, la popularité d’Amin continuait de croître en Ouganda.
Il était passionné de la pensée socialiste, il promettait des élections mais se perpétuait au pouvoir. Il a profité de sa popularité pour camoufler ses crimes. Il a engagé des escadrons de la mort et les a mis à la recherche de ses opposants et des partisans d’Obote, l’ancien président démis de ses fonctions, qui était entre-temps réfugié en Tanzanie voisine.
L’insanité génocidaire
En 1972, Amin Dada a commencé par expulser massivement les populations indo-pakistanaises du pays. Ensuite, il a procédé à persécuter les bantous et les juifs Ougandais. C’est après qu’il fit tuer de nombreux israéliens, lors de l’opération d’Entebbe, dont le frère du Premier ministre israélien Netanyahu. Cela poussa l’Ouest à s’allier contre lui. Ce massacre en particulier était une réponse aux opérations de sabotage préalables qu’Israël avait perpétré en Ouganda, notamment lors de la prise d’otages de 1976.
L’Union Soviétique, le Kenya et la Libye de Kadhafi devinrent les principaux collaborateurs diplomatiques d’Amin Dada durant les deux années qui suivirent. Dans sa folie de grandeur, il commença à s’auto-attribuer des médailles de bravoure. Il puisait directement dans les caisses de l’Etat et il avait même annoncé qu’il remplaçait la reine d’Angleterre à la tête du Commonwealth. Amin Dada tenta même d’envahir la Tanzanie, en vain.
En 1978, le Sud ougandais s’est levé contre Amin Dada, et avec le support de l’armée tanzanienne, le gouvernement d’Idi ne pouvait plus tenir le pays. Le 11 avril 1979, Amin Dada a fui Kampala et partit pour l’exil, au début en Libye, ensuite en Arabie saoudite. Il est mort en 2003 à Djeddah après une « retraite » calme.
Selon les données des ONG, le régime d’Idi Amin Dada a fait autour de 370 000 victimes. L’Ouganda souffre encore des séquelles de sa mauvaise gouvernance économique et de son pillage des caisses de l’Etat. Ce n’est pourtant pas son héritage le plus affreux. Il s’agit là d’un homme qui a écrit son histoire avec le sang.