Quelques jours après l’investiture de Mamady Doumbouya et un mois après son coup d’Etat qui a fait tomber Alpha Condé, le nouveau président guinéen a nommé un Premier ministre civil. Qui est Mohamed Béavogui ?
« Un vétéran du développement », « un haut fonctionnaire international » ou un interlocuteur privilégié pour les entrepreneurs ouest-africains… En Guinée, la nomination du nouveau Premier ministre, Mohamed Béavogui fait le consensus. Toutefois, cet homme est un quasi inconnu de la politique interne de la Guinée. Pourra-t-il être l’homme de la situation ? En tout cas, son CV détonne avec les habitudes d’un Mamady Doumbouya qui accueille ambassadeurs et chefs d’Etat pistolet à la ceinture. Béavogui aura pour mission de conduire une transition crédible en Guinée.
A côté de Doumbouya — démuni d’un profil diplomatique —, Béavogui fait office d’interlocuteur crédible pour les instances africaines et internationales. Ancien dirigeant du Fonds international de développement de l’agriculture (FIDA) en Afrique de l’Ouest et du Centre, on lui attribue un rôle dans le développement de l’agriculture dans la région. Mohamed Béavogui serait à l’initiative de plusieurs projets nationaux de transformation de bauxite, sous la présidence d’Ahmed Sékou Touré. Il serait aussi de la famille du président par intérim Louis Béavogui. Son nom faisait partie d’une short-list pour le poste de Premier ministre, alors que Lansana Conté était au pouvoir.
La stature internationale de Mohamed Béavogui
Là où Mohamed Béavogui est devenu une figure internationale crédible, c’est lors de sa participation au Forum économique mondial – le forum de Davos –, où il fit partie du panel qui avait établi le rapport de compétitivité mondiale (GCR). Le rôle de Béavogui reste cependant très flou, sa présence à cet événement ayant été entourée de nombreuses questions.
Cet homme, s’il est affublé d’une stature internationale, devra gérer la complexité du paysage guinéen pour « imposer » une transition crédible. Mamady Doumbouya bénéficie d’une popularité certaine et d’un soutien indéfectible de la part de l’armée. Et le putschiste, ex-légionnaire français, est attaqué par les instances régionales. Globalement, cependant, la Guinée s’en sort relativement bien, avec de légères sanctions contre les putschistes et une adhésion suspendue au sein de la Cedeao et de l’UA. Le Mali, qui subit plus de pressions, soutient ouvertement la Guinée. Par ailleurs, le président malien – également militaire –, Assimi Goïta, a été le seul chef d’Etat à assister à l’investiture de son homologue guinéen.
Deux pays qui semblent suivre la même voie. La nomination d’un Premier ministre civil a été suivie, au Mali, d’un retrait rapide du président et chef de la junte de la gestion des affaires publiques et de la diplomatie officielle. Doumbouya suivra-t-il les pas d’Assimi Goïta ? Contrairement à Choguel Maïga, Mohamed Béavogui n’est pas « un homme du pays ». A vrai dire, il n’a passé que peu de temps en Guinée depuis les années 1980.
Mamady Doumbouya montre cependant sa volonté de former un gouvernement. Il devrait sans aucun doute laisser les pourparlers avec les sphères financières et la diplomatie occidentale à son Premier ministre, qui apparaît plus crédible dans ces domaines. Le nouveau Premier ministre sera attendu pour la nomination, avant la fin du mois d’octobre, des membres du gouvernement.