Dans un document confidentiel, le ministre ghanéen des Transports dénonce la façon dont Vincent Bolloré a obtenu la gestion du port de Tema. Un contrat litigieux « offert » à l’homme d’affaires français.
L’homme d’affaires français Vincent Bolloré compte le port de Tema parmi les nombreuses concessions ouest-africaines qu’il détient déjà. Dans un rapport extrêmement bien détaillé, Andrew Weir, d’Africa Confidential, revient sur la façon dont le Français a obtenu ce contrat avec le Ghana.
Un autre document confidentiel, celui-ci remis aux ministres et rédigé par le ministère des Transports, faisait alors remarquer aux dirigeants ghanéens un « manque de transparence et d’éthique » de la part des opérateurs occidentaux dans cette opération. « Les termes des accords entre MPS (Meridian Port Services) et l’Etat sont totalement opposés aux intérêts du Ghana », indique en substance le rapport, qui a été remis aux ministres en février 2018, plusieurs années après les premières négociations entre les autorités et MPS, une société détenue par Bolloré Transport and Logistics et APM Terminals.
Actuellement inquiété par la justice française pour corruption, Vincent Bolloré risque bien également de se retrouver devant les tribunaux hexagonaux pour ses affaires au Ghana. « Les concessions que Bolloré a obtenues au Ghana sont similaires à celles qu’il a obtenues pour ses opérations au port de Lomé, au Togo », indique le rapport d’Africa Confidential.
Cadeaux fiscaux et préjudices pour le Ghana
A l’époque, en 2014, le président John Dramani Mahama avait offert à Bolloré le contrat d’un terminal à conteneurs sans appel d’offres. L’homme d’affaires a également surestimé son investissement pour bénéficier d’exonérations fiscales à hauteur de 832 millions de dollars. L’homme d’affaires français avait enfin demandé au Ghana de réduire de moitié sa participation dans MPS. Le document indique, de plus, que Bolloré a fait grimper les prix de ses services en obtenant le monopole sur la manutention des conteneurs et réduit la redevance versée au gouvernement sur toute la durée de la concession.
Selon le rapport ministériel, les conditions dans lesquelles MPS exploite le nouveau terminal ont été « gravement préjudiciables au gouvernement et au peuple du Ghana ». Le document demande que « les engagements soient soigneusement réexaminés ». Problème : Nana Akufo-Addo, en succédant à Mahama en 2016, n’a pas souhaité modifier le contrat entre le Ghana et Bolloré, et ce malgré l’insistance du ministère des Transports. Africa Confidential pointe la responsabilité des dirigeants qui ont décidé de ne jamais évoquer ce sujet lors des campagnes électorales et rappelle que l’homme d’affaires français, pour assouvir ses ambitions économiques, est généralement très impliqué dans la vie politique africaine. Alhaji Asoma Banda, l’un des plus anciens amis et partenaires commerciaux de Bolloré au Ghana, a une influence politique certaine. Il a lui-même contribué à imposer MPS aux membres du gouvernement.