Un think-tank étudie la création d’un système de Bus Rapid Transport à Tunis. La capitale tunisienne n’a jamais réussi à développer ses transports en commun.
En janvier dernier, La Presse de Tunisie, le principal journal francophone tunisien, déplorait le « spectacle désolant » des transports en commun tunisiens. « Le problème de l’encombrement dans les transports publics (…) ne se résoudra apparemment jamais », écrivait le quotidien après d’énièmes bousculades dans les louages — les taxis collectifs — et dans le métro tunisois.
Pour le journal La Presse de Tunisie, le problème revient au ministère du Transport, qui devrait « améliorer la qualité des services offerts aux citoyens et usagers de moyens de transport public sur tous les plans et proposer un minimum de confort, de disponibilité, de sécurité à tous ceux qui sont dans l’obligation d’utiliser les moyens de transport en commun ».
Il faut dire que la capitale tunisienne est loin des grandes agglomérations en termes de transports publics : malgré un parc d’un millier de bus gérés par la Société des transports de Tunis (STT) et six lignes principales de métro, les usagers qui peuvent se le permettre préfèrent largement emprunter les taxis tunisois. De quoi engorger, chaque matin et chaque fin d’après-midi les artères de Tunis et sa banlieue. Dans un rapport de 2019, la Banque mondiale estime que « l’étalement spatial des villes et l’offre limitée des services de transports publics conduisent à l’utilisation fréquente des voitures particulières, ce qui contribue à la croissance de la congestion et de la pollution ». Outre Tunis, Sfax est également concernée par ces congestions.
Les transports gérés par… 6 ministères !
Et alors que le système de transports publics est défaillant, « les taux de mobilité des habitants ont crû fortement dans les villes tunisiennes », continue la Banque mondiale qui estime que les Sfaxiens, par exemple, se déplacent 2,3 fois chaque jour. Dans les grandes villes tunisiennes, le taux de possession d’un véhicule personnel a augmenté de 6 % en dix ans. Une évolution qui « s’avère préoccupante s’agissant de l’évolution de la congestion », selon la Banque mondiale qui estime le coût de la congestion à 2 % du PIB tunisien.
L’institution déplore notamment la gestion publique des transports. Pas moins de six ministères —Transport, Equipement et Habitat, Energie, Finances, Collectivités Locales, Investissement et Coopération Internationale — seraient en effet « concernés à des titres divers par les transports urbains ». La Banque mondiale estime par ailleurs que « les transports publics n’apparaissent pas organisés de façon optimum et n’offrent pas aux usagers une qualité de service satisfaisante », et s’étonne de la « sous-optimisation » des infrastructures. Un constat de désaveu pour les pouvoirs publics, alors que les ménages tunisiens consacreraient près de 10 % de leur budget aux transports.
Réduire les temps de trajet et favoriser l’accès à l’emploi
Pour maîtriser la fluidité du trafic routier dans le Grand Tunis, sur demande de l’Institut tunisien des études stratégiques (ITES), le bureau d’études spécialisé dans les infrastructures de transport terrestre, ferroviaire, portuaire et aéroportuaire DTA vient de lancer une étude de préfaisabilité pour la mise en place d’un système de Bus Rapid Transport (BRT) dans le Grand Tunis. Objectif : étudier la mise en place de 80 véhicules pour désengorger la ligne 28D qui relie Tunis au Kram. Moins cher que l’installation d’un tramway, le système BRT doit, de plus, permettre de réduire le temps de trajet. L’ITES promet, ainsi, de permettre un meilleur accès à l’emploi.
Reste à savoir si l’Etat prendra en compte l’étude de l’ITES. « Les transports urbains tels qu’ils sont pensés et organisés aujourd’hui n’apparaissent pas toujours centrés sur les besoins des citoyens, mais d’avantage sur les aspects techniques et sur les préoccupations des principaux acteurs (opérateurs, institutions, …), les usagers n’étant d’ailleurs souvent représentés par aucune organisation propre dans les instances de décision », déplorait en 2019 la Banque mondiale, qui avait déjà préconisé la mise en place d’un système BRT « sans tarder ».