En pleine présidentielle, une attaque s’est déclenchée au Tchad, dans la région du Tibesti, où le Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) a tenté de déstabiliser le pouvoir en place.
Le groupe rebelle FACT, établi en Libye et opposé au sixième mandat d’Idriss Déby, a déclaré la guerre au gouvernement tchadien ce dimanche, prenant d’assaut la région du Tibesti. Le ministre de la Communication tchadien avait annoncé lundi que « la situation était sous contrôle », mais un communiqué, publié mardi soir, a annoncé avoir que le FACT avait repoussé la contre-offensive de l’armée et pris Tibesti.
Dans la soirée du 11 avril, des troupes du FACT ont traversé la frontière libyenne. Plusieurs colonnes de véhicules débordants d’hommes lourdement armés ont attaqué le poste-frontière de Zouarké vers 19h. L’armée tchadienne a essayé de les intercepter, mais deux hélicoptères de combat ont été neutralisés, et les troupes gouvernementales ont subi de lourdes pertes et ont dû se replier.
Dans la journée de lundi, les soldats du FACT ont pris Zouarké et Zouar. Le mardi, vers midi, ils tenaient déjà Faya. L’aviation française de Barkhane, déployée depuis l’est malien, a essayé d’intervenir, en vain. La rébellion a appelé Paris à rester neutre et des députés français ont averti leur gouvernement des répercussions d’une ingérence de cette envergure dans les affaires tchadiennes.
Le Front pour l’alternance et la concorde au Tchad (FACT) est un groupe militaire hautement politisé. Ses soldats sont d’origine Toubou nomade et comptent presque 1 100 combattants. En 2014, la faction gorane du groupe UFDD a formé le FACT lors d’une scission interne, alors que le groupe UFDD participait à la guerre civile libyenne du côté de la Troisième force à Fezzan.
C’était le chef actuel du FACT, en 2016, qui avait rappelé les Gorans à se battre au Tchad contre Idriss Déby, réclamant l’alternance de pouvoir au Tchad. Mahamat Mahdi Ali a appelé dimanche à « maintenir la pression sur la dictature d’un homme qui ne comprend que la violence », se référant au président Déby.
Déby de plus en plus esseulé
Le président Idriss Déby, au pouvoir depuis 31 ans, brigue son 6e mandat à la tête du Tchad. L’opposition politique lui avait offert une amnistie générale en mars s’il acceptait d’abandonner le pouvoir et de reporter l’élection, ce qu’il refusa.
Résultat, le scrutin s’est passé sous haute tension, marqué par le boycott de la majeure partie de l’opposition. Face à l’inévitable réussite de Déby, le FACT a donc lancé son offensive. Le gouvernement avait nié, dimanche soir, que l’attaque du FACT visait le Tchad. Pire encore, lors d’une sortie médiatique dimanche soir, le ministre de la Communication avait déclaré : « Nous condamnons fermement, une fois de plus, cette énième tentative de déstabilisation de la Libye après celle de l’ensemble du Sahel lancée en 2011 à la suite de la chute du régime de Kadhafi ».
Au fur et à mesure de son offensive, le FACT a multiplié les communiqués, déclarant que ses attaques visaient des positions militaires tchadiennes et demandant aux soldats du maréchal Déby de déposer leurs armes ou de rejoindre la rébellion.
Face à ce scénario catastrophique, et avec l’actuelle passivité de son meilleur allié, la France, que fera Idriss Déby ? Son armée a déjà été repoussée, et plusieurs régiments tchadiens sont au Niger et au Burkina Faso, participant à la guerre française dans la « zone des Trois frontières ». En plus de l’hostilité populaire à l’encontre du gouvernement, la situation peut tourner au vinaigre à N’Djamena. Dossier à suivre.