Le meilleur moyen de lutter contre la transmission du chikungunya est de se protéger individuellement contre les piqûres de moustique et de ralentir leur reproduction.
Au cours du mois d’août 2023, une épidémie de chikungunya a été identifiée au Sénégal, touchant la région de Kédougou, dans le sud du pays. Les trois départements de cette région ont signalé 112 cas confirmés de cette maladie virale. Bien que le chikungunya soit relativement rare au Sénégal, les autorités sanitaires cherchent à apaiser les inquiétudes en soulignant qu’aucun cas grave n’a été signalé jusqu’à présent.
Le virus du chikungunya est originaire d’Afrique mais il s’est répandu dans le monde au fil des ans. Au cours des 20 dernières années, de plus en plus d’infections par le chikungunya ont été signalées dans les pays africains, mais le tableau général de sa circulation reste sous-estimé, la maladie étant sous-diagnostiquée et insuffisamment déclarée.
Le virus du chikungunya a été identifié pour la première fois en Tanzanie en 1952. Le chikungunya est une maladie infectieuse provoquée par un virus transmis aux humains par des moustiques du genre Aedes (moustique tigre). Le nom de la maladie signifie “celui qui marche courbé”, parce que l’infection entraîne non seulement une forte fièvre, mais aussi des douleurs articulaires et musculaires. Ce nom est dérivé d’un mot de la langue kimakonde – parlée dans le sud-est de la Tanzanie et au nord-est du Mozambique – et qui signifie “se déformer”.
D’après l’OMS, depuis 2004, des flambées urbaines de chikungunya ont été signalées dans plus de 110 pays d’Asie, d’Afrique, d’Europe et des Amériques. Ces flambées sont devenues plus fréquentes et plus étendues là où des populations d’Aedes aegypti ou d’Aedes albopictus sont bien établies. Dans ces régions, une transmission locale par les moustiques est désormais connue.
Mes recherches portent, principalement, sur l’épidémiologie des agents pathogènes à transmission vectorielles responsables des maladies fébriles en Afrique de l’Ouest. Dans cet article, j’explique les symptômes, le traitement, le diagnostic et la prévention de cette infection.
Symptômes, traitement et vaccins
Chez les cas qui présentent des symptômes, la maladie se manifeste après une incubation de 4 à 8 jours en moyenne, suite à la piqûre d’un moustique tigre infecté. Une fièvre élevée (supérieure à 38,5°C) apparaît brutalement, accompagnée de maux de tête, de courbatures ou de douleurs articulaires, qui peuvent être intenses, touchant principalement les poignets, chevilles et phalanges et qui sont souvent très handicapantes.
Ces symptômes durent généralement quelques jours, mais peuvent persister pendant des semaines ou des mois. L’évolution peut être rapidement favorable, si le malade répond bien au traitement symptomatique. Après la guérison, les patients ont de fortes chances d’avoir acquis une immunité contre de futures infections.
La prise en charge clinique vise essentiellement à soulager la fièvre et les douleurs articulaires au moyen d’antipyrétiques, d’analgésiques adaptés, d’un bon apport en liquides et d’un repos du patient. Il n’existe pas de médicament antiviral spécifique contre l’infection par le chikungunya.
Plusieurs vaccins sont en cours de développement, mais ils ne sont pas encore homologués. C’est pourquoi l’OMS encourage les pays à une meilleure prise en charge des malades et une mise en œuvre de stratégies de communication sociale visant à réduire la présence des moustiques vecteurs.
Diagnostic
Le virus du chikungunya peut être détecté directement dans des échantillons sanguins prélevés chez le patient au cours de la première semaine de la maladie par PCR (technique d’amplification de l’ADN ou ARN du porteur de la maladie). D’autres tests peuvent détecter la réponse immunitaire d’une personne à l’infection par le virus du chikungunya.
Ces tests sont généralement utilisés pour rechercher la présence d’anticorps dirigés contre le virus, qui sont généralement détectables dès la première semaine après l’apparition de la maladie et peuvent encore être détectés pendant environ deux mois.
C’est pourquoi l’OMS encourage les pays à acquérir et à maintenir les capacités nécessaires à la détection et à la confirmation des cas.
Prévention et lutte
Lors d’une piqûre, le moustique tigre prélève le virus sur une personne infectée, et à l’occasion d’une autre piqûre, il le transmet à une personne saine. C’est pourquoi, le meilleur moyen de lutter contre la transmission du chikungunya est de se protéger individuellement contre les piqûres de moustique (vêtements longs, répulsifs cutanés, moustiquaires), et de détruire les gîtes larvaires les plus accessibles.
Il faut pour cela mobiliser les communautés qui jouent un rôle essentiel dans la réduction des sites de reproduction des moustiques en vidant et en nettoyant régulièrement les récipients contenant de l’eau, en éliminant les déchets et en soutenant les programmes locaux de lutte contre les moustiques.
Lors de flambées épidémiques, des insecticides peuvent être pulvérisés pour tuer les moustiques adultes. Les moustiquaires de fenêtre et de porte peuvent empêcher aussi les moustiques de pénétrer dans les habitations. Les moustiquaires imprégnées d’insecticide doivent être utilisées (jour et nuit) contre les moustiques qui piquent, en particulier les jeunes enfants et les personnes malades ou âgées.
Toutes ces mesures peuvent également être prises à titre d’urgence par les autorités sanitaires pour lutter contre les moustiques.
Cheikh Sokhna, Directeur de recherche à l’IRD, Institut de recherche pour le développement (IRD)
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.