Hier, l’ancien président ivoirien Henri Konan Bédié est mort à l’âge de 89 ans. Il laisse derrière lui un parti, le PDCI-RDA, affaibli par les dissensions internes et les luttes personnelles.
Ce mardi, l’ancien président de la République de Côte d’Ivoire, Henri Konan Bédié, est mort à l’âge de 89 ans. Alors que le Parti démocratique de Côte d’Ivoire-Rassemblement démocratique africain (PDCI-RDA) préparait les élections locales de septembre, la succession est ouverte. Une succession qui s’annonce difficile.
Fin mars dernier, lors du congrès extraordinaire du PDCI, l’hégémonie de « HKB » commençait à agacer les cadres du parti qui savaient que, s’il n’avait pas nommé de successeur, Bédié laisserait un parti rongé par les luttes internes une fois parti.
D’autant que, depuis de nombreux mois, le PDCI a dû faire face à un mercato difficile, certaines personnalités ayant décidé de quitter le navire. Fin mars, le porte-parole du parti, Soumaïla Bredoumy, admettait que le PDCI avait vécu une « période de fortes turbulences » et « connu des départs importants, notamment des cadres à qui le PDCI avait fait confiance en leur confiant des missions de premier rang ».
Luttes de pouvoir
Lors de la dernière présidentielle, en 2020, plusieurs cadres, à l’instar de Jean-Louis Billon, espéraient prendre officiellement la succession de Bédié, qui avait cependant préféré vivre une dernière bataille électorale. Successeur de Félix Houphouët-Boigny, qui avait bien préparé l’avenir en léguant sa fortune au « Sphinx de Daoukro ». HKB, lui, n’a jamais nommé son dauphin. Et c’est ce qui pourrait être fatal au PDCI-RDA.
Car déjà, tous les yeux sont rivés sur 2025 et la prochaine présidentielle. Billon avait, un peu trop en avance et sans réelle vision politique, annoncé sa candidature. L’homme d’affaires a un avantage : il est à la tête d’une belle fortune. Mais politiquement, Billon n’a jamais convaincu en interne, à l’exception de la jeune garde. Thiam a, lui aussi, espéré faire son retour en Côte d’Ivoire au PDCI, mais là aussi, le banquier ne fait pas l’unanimité.
C’est sans doute la particularité du PDCI-RDA. La formation devait transmettre l’héritage de Félix Houphouët-Boigny, elle est devenue le point de convergence des intérêts tribaux, personnels et financiers des uns et des autres. Année après année, HKB a offert des postes et des avantages à certains cadres pour les conserver auprès de lui. Allant jusqu’à faire tomber en disgrâce certains anciens très proches, comme Maurice Kakou Guikahué.
Vers une scission inévitable ?
Conséquence : Bédié parti, le PDCI est coupé en deux clans — celui de Guikahué d’un côté, celui des fidèles de HKB de l’autre, Bernard Ehouman et Niamien N’Goran en tête —, si ce n’est plus. Jean-Louis Billon, Thierry Tanoh et les autres espèrent depuis des années se faire un nom. Ces dissensions montrent surtout que le PDCI-RDA ne repose sur aucune idéologie politique claire et est devenu une simple machine électorale qui permettra aux différents égos de se mettre en avant.
En attendant, la mort de Bédié pourrait avoir deux conséquences : la première de scinder le parti en autant de courants présents ; la seconde d’amener le Rassemblement des houphouëtistes pour la démocratie et la paix (RHDP) à aller chercher les indécis. Tout se jouera certainement après les élections municipales. Les membres du parti, qui pouvaient auparavant compter sur Bédié pour mettre fin aux luttes intestines, risquent alors de se déchirer. Et de mettre, ainsi, en péril l’avenir du PDCI.