Lors du sommet de la Ligue arabe, marqué par les présences des présidents syrien et ukrainien, Abdelmadjid Tebboune s’est fait représenter par son Premier ministre. Pourquoi ?
Le 32e sommet de la Ligue arabe, qui a eu lieu vendredi dernier à Djeddah, n’est pas passé inaperçu. Et pour cause : les observateurs n’ont pas manqué de souligner le retour du président syrien Bachar al-Assad, qui est resté pour le moins discret, bénéficiant de la présence très médiatisée du président ukrainien Volodymyr Zelensky. Devant un parterre de chefs d’État, ce dernier a déploré que « certains pays arabes ferment les yeux sur la violation de l’intégrité territoriales de l’Ukraine ».
Si la venue de Zelensky ne devrait pas changer grand-chose, elle a cependant provoqué un certain malaise au sein de la Ligue arabe. Aux yeux du monde, le prince héritier d’Arabie saoudite Mohammed ben Salmane, alias MBS, est donc apparu comme un chantre de la paix. C’est à son initiative que le président ukrainien s’est rendu à Djeddah. MBS a réussi un joli coup diplomatique, même si, face à lui, manquaient à l’appel plusieurs leaders.
Outre les absences remarquées du président des Émirats arabes unis, Mohammed ben Zayed Al Nahyane, et du roi du Maroc, Mohammed VI, le président algérien Abdelmadjid Tebboune n’était également pas présent à Djeddah. Une absence importante, d’autant plus que le dernier sommet de la Ligue arabe avait eu lieu à Alger et que le chef de l’État algérien est président en exercice de la Ligue arabe.
L’Arabie saoudite a manqué de diplomatie
Peu avant le sommet saoudien — la veille, au soir —, la présidence algérienne a tenu à prévenir que c’est le Premier ministre algérien, Aimene Benabderrahmane, qui représenterait officiellement Abdelmadjid Tebboune à Djeddah. Du côté d’Alger, on a rapidement tenu à mettre les choses au clair : l’absence de Tebboune ne serait pas due à la présence du président ukrainien.
En réalité, expliquent plusieurs sources proches de la présidence algérienne au journal TSA, Mohammed ben Salmane aurait manqué de bienséance vis-à-vis d’Alger. On se souvient notamment de l’absence remarquée du prince héritier à Alger, lors du dernier sommet de la Ligue arabe, en fin d’année dernière — même s’il avait prétexté des raisons médicales, le prince s’était rapidement envolé pour l’Asie. MBS, comme MBZ, avait tardé à annuler sa venue et incité le roi Mohammed VI à refuser l’invitation du président algérien.
Partisane de la réciprocité, l’Algérie a donc logiquement décliné l’invitation. D’autant que d’autres événements auraient perturbé Alger : lors de la préparation du sommet de Djeddah, la délégation algérienne n’aurait en effet pas été invitée aux réunions préparatoires. Et notamment au mini-sommet d’Amman, début mai, qui devait permettre de négocier un retour consensuel de la Syrie au sein de la Ligue arabe. Pourtant, l’Algérie a été particulièrement active dans ce dossier.
L’attitude très personnelle de MBS ne passerait donc pas à Alger. Comme de nombreux autres pays de la Ligue arabe, on ne comprend pas l’initiative pro-Ukraine du prince héritier qui a fait prendre un tournant étonnant à la Ligue arabe. La presse algérienne estime que Mohammed ben Salmane a « privatisé » le sommet. Là où Alger, en fin d’année dernière, avait préféré jouer l’unité en lançant une invitation en bonne et due forme au roi du Maroc.