L’opposante Reckya Madougou, qui a écopé d’une peine de 20 ans de prison, est aujourd’hui isolée. Les autorités carcérales refusent de lui autoriser les visites. Ses avocats dénoncent un acharnement politique.
Au Bénin, l’opposante à Patrice Talon, Reckya Madougou, qui a écopé d’une peine de 20 ans d’emprisonnement après une parodie de procès, est bien seule. Même les avocats de l’ex-conseillère du président togolais Faure Gnassingbé sont interdits de visite. Détenue dans une cellule de la prison d’Akpro-Missérété, dans le sud-est du Bénin, Reckya Madougou semble être volontairement isolée. Avant son procès, en juillet 2021, l’un des avocats de l’opposante, Mario Stasi, avait dénoncé « des conditions de détention indignes », indiquant que Reckya Madougou n’avait pas le droit aux visites, hormis celle de sa mère. L’avocat parlait alors d’« un vrai isolement qu’on lui fait subir ».
Il y a une semaine, des députés des Démocrates, le parti pour lequel Reckya Madougou comptait être candidate lors de la dernière présidentielle, se sont rendus à la prison d’Akpro-Missérété, pour une « visite de courtoisie » à Reckya Madougou. Trois jours plus tard, ils ont tenté de rendre visite cette fois à Joël Aïvo. Mais dépourvus de permis de visite, les élus se sont vu refuser l’accès à l’établissement pénitentiaire. Lors d’une nouvelle visite à Reckya Madougou, là encore il n’a pas été permis aux élus de rencontrer l’opposant emprisonnée.
Un traitement spécial
Le collectif des avocats de Reckya Madougou « dénonce et condamne cet énième acharnement qui ne vise qu’à l’empêcher de continuer à exercer ses droits civils et politiques », indique un communiqué de presse qui déplore que ces interdictions de visites ne se basent sur aucun fondement juridique. « Non seulement ledit décret (qui impose le permis de visite, ndlr) est tombé en désuétude, mais en plus il tire son fondement de textes législatifs abrogés ou devenus caducs de sorte qu’il ne saurait donc produire quelque effet de droit ».
Le collectif d’avocat estime que « chaque jour qui passe ne fait qu’empirer la situation des auteurs à divers niveaux de la chaîne pénale de cette détention que les Nations unies ont, dans leur avis contradictoire, jugée triplement arbitraire ». « Le fallacieux prétexte du permis de visite avancé aujourd’hui pour refuser désormais et de nouveau à la présidente Reckya Madougou toute visite de ses proches (en dehors de sa mère de 73 ans) n’est qu’une confirmation surabondante que sa détention ne relève que de motivations strictement politiques », poursuivent les avocats.
La situation des autres détenus prouve en effet l’acharnement que subit Reckya Madougou : « Pendant ce temps et dans toutes les prisons du Bénin, tous les autres détenus recevaient et continuent de recevoir des délégations de leurs collègues ou amis et sans production de permis spécial de visite », indique le communiqué des avocats de Madougou qui demandent une nouvelle fois sa libération.