Les Etats-Unis demandent à l’Ouganda de choisir entre l’Amérique et la Russie. Un chantage que Washington a décidé d’imposer à tout le continent.
C’est un chantage qui met en porte à faux de nombreux pays africains. Lors d’une tournée africaine, Linda Thomas-Greenfield, l’ambassadrice américaine aux Nations unies (ONU), déclarait récemment que, « si un pays décide de s’engager avec la Russie, où il y a des sanctions, alors il enfreint ces sanctions. Il enfreint nos sanctions et, dans certains cas, il enfreint les sanctions de l’ONU avec d’autres pays. Et nous conseillons aux pays de ne pas enfreindre ces sanctions, car s’ils le font, ils risquent de faire l’objet de mesures à leur encontre pour avoir enfreint ces sanctions ».
C’est en Ouganda que la diplomate a lancé son ultimatum. Une menace qui n’est pas anodine. Comme le rappelle, ce matin, Africa Intelligence, la rumeur d’une importation de carburant russe à Kampala inquiète en effet les Etats-Unis qui, selon le journal français, « tentent de faire pression sur leur allié ougandais ».
Des déclarations menaçantes des USA
Pour Yoweri Museveni, le président ougandais, peu habitué à se faire dicter sa conduite, c’est un dilemme important qui se dresse face à lui. Car en période de crise financière, l’acquisition de produits pétroliers bon marché est une aubaine. Mais la menace américaine pourrait bien mettre à mal les finances du pays, Washington faisant régulièrement des dons pour l’aide aux réfugiés et la santé.
La menace de Linda Thomas-Greenfield est loin du programme annoncé avant son départ en Afrique. La diplomate avait en effet promis une « tournée d’écoute ». Elle voulait alors, disait-elle, « trouver des solutions, et non blâmer » les pays africains, notamment après les votes à l’ONU des pays en faveur de la Russie ou leur abstention.
Dès son arrivée en Ouganda, elle avait cependant déclarait que « les pays peuvent acheter des produits agricoles russes, y compris des engrais et du blé », mais que les Etats-Unis refuseraient tout engagement sur le long terme avec la Russie.
Yoweri Museveni a beau être un allié de Washington, il n’a pas voulu s’ingérer dans le conflit russo-ukrainien. Il a d’ailleurs exprimé à plusieurs reprises sa sympathie pour Moscou.
Le chantage des aides au développement
Reste que la guerre en Ukraine a eu de graves conséquences en termes d’inflation et de crise alimentaire. Et les sanctions onusiennes et américaines contre la Russie empêchent certains pays, notamment africains, de pouvoir importer des produits de première nécessité, des engrais ou du pétrole.
Ce que conteste Thomas-Greenfield, qui a osé affirmer que les sanctions imposées par Washington n’était pas responsables de la hausse des prix alimentaires en Afrique. La diplomate assure que les Etats-Unis veulent mettre en place des partenariats avec « des intérêts mutuels » entre l’Oncle Sam et l’Afrique.
Drôle de conception du partenariat gagnant-gagnant. Peu avant la diplomate américaine, c’est Sergueï Lavrov, ministre russe des Affaires étrangères, qui s’était rendu sur le continent. Il avait alors déploré « la réaction absolument inadéquate de l’Occident, qui a annoncé des sanctions » contre la Russie.
De son côté, l’Europe est elle aussi entrée dans un chantage incompréhensible : en avril dernier, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen affirmait qu’il fallait « punir les pays africains qui se sont abstenus ou ont voté contre la résolution présentée à l’ONU ». Elle indiquait qu’il fallait notamment, pour ces pays, supprimer les aides au développement.