L’ancien ministre sénégalais Abdoulaye Bathily devrait être désigné représentant spécial de l’ONU en Libye. Un poste délicat. Sa nomination marque le retour au premier plan de l’Afrique dans ce dossier actuellement au point mort.
C’est un poste si difficile qu’il est régulièrement vacant depuis 2011. Depuis la chute, puis la mort, de Mouammar Kadhafi, le Guide de la révolution libyenne, plusieurs représentants spéciaux de l’Organisation des Nations unies (ONU) dans le pays — sept — se sont succédé. Le dernier représentant spécial, le Slovaque Jan Kubis, n’a pas échappé à la tendance : il avait démission moins d’un an après sa désignation à ce poste. Depuis le début de l’année, donc, c’est l’Américaine Stephanie Williams qui assure l’intérim, en tant que conseillère spéciale d’Antonio Guterres, le secrétaire général de l’ONU.
Ce lundi, selon Jeune Afrique, la candidature d’Abdoulaye Bathily devrait être proposée au Conseil de sécurité. Une candidature qui, sauf surprise de dernière minute, devrait être validée, faisant du Sénégalais le premier Africain à ce poste. Historien de formation, Bathily a été ministre de l’Environnement et de la Protection de la Nature de 1993 à 1998, puis ministre de l’Énergie et de l’Hydraulique entre 2000 et 2001. En 2012, il avait été désigné par le président sénégalais Macky Sall ministre d’Etat.
La solution africaine privilégiée
Avec Denis Sassou N’Guesso, déjà président du Comité de haut niveau de l’Union africaine (UA) sur la Libye, cette future désignation représente donc certainement le retour au premier plan de l’Afrique dans le dossier libyen après l’échec des diplomaties occidentales, notamment européennes. Alors que Macky Sall est le président en exercice de l’UA, le fait qu’un Sénégalais devienne représentant de l’ONU en Libye va d’ailleuurs dans ce sens.
Pourtant, il y a trois ans maintenant, l’UA voulait être partie prenante dans ce dossier, en désignant un émissaire conjoint de l’UA et de l’ONU. Une volonté refusée, qui avait amené l’institution continentale à être écartée, mois après mois, du dossier. Selon JA, Denis Sassou N’Guesso aurait eu des conversations téléphoniques avec des délégations libyennes et avec les Russes et les Américains. Le voyage du ministre russe des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, en juillet à Brazzaville a également dû être l’occasion pour le chef d’Etat congolais de discuter de la Libye.
Mission impossible ?
Reste que la mission d’Abdoulaye Bathily s’annonce difficile. Car la Libye est un véritable bourbier politique, notamment depuis la fin d’année dernière. Des élections, notamment une présidentielle, devaient avoir lieu et avaient été reportées au dernier moment sans que les diplomaties étrangères ne réussissent à s’entendre pour travailler à un report clair des scrutins. Alors que les mois ont défilé, les élections n’ont toujours pas eu lieu et, pire, il n’est aujourd’hui même plus question pour les Libyens de se rendre dans les bureaux de vote à court, voire à moyen terme.
Aujourd’hui, deux Premiers ministres, Abdel Hamid Dbeibah et Fathi Bachagha, se disputent la gestion des affaires courantes libyennes et tentent de créer des jeux d’alliances de plus en plus instables. Pour le Sénégalais, il s’agit donc d’une mission extrêmement compliquée. D’autant que le bilan de ses prédécesseurs reste plus que mitigé. Ancien représentant spécial du secrétaire général de l’ONU en 2014, Abdoulaye Bathily était alors cantonné à son rôle en Afrique centrale. Il y a trois ans, il avait conduit des négociation entre les parties libyennes à Dakar. Les choses sérieuses débuteront pour lui une fois sa candidature acceptée par le Conseil de sécurité des Nations unies…