En RDC, l’arrestation de l’ancien conseiller de la présidence en sécurité, François Beya, samedi dernier, n’a toujours pas révélé ses secrets. En attendant, le remplaçant de « Monsieur renseignements » a déjà été nommé. La présidence, de son côté, évoque des menaces à la sûreté nationale.
Ce mardi soir, un communiqué de la présidence de la République démocratique du Congo (RDC) a annoncé le remplacement du conseiller spécial en matière de sécurité, François Beya.
L’assistant de Beya, Jean-Claude Bukasa, assurera l’intérim, « compte tenu de l’empêchement » de son supérieur, lit-on dans le document présidentiel.
François Beya avait été arrêté, samedi dernier, par l’Agence nationale des renseignements (ANR). Beya était, jusqu’à son arrestation, l’homme fort des services de renseignements congolais. Il avait côtoyé quatre présidents depuis le début des années 1990. Sa nomination au cabinet du président faisait partie de l’accord entre l’actuel président de la RDC, Félix Tshisekedi, et son prédécesseur, Joseph Kabila.
Depuis l’arrestation de François Beya, aucun détail concret n’a filtré quant à la raison de sa mise aux arrêts. L’opinion publique, elle, évoque une « guerre de palais », avec une volonté de « dékabilisation » à la tête du pouvoir. Selon des sources proches du pouvoir, c’est une tentative de coup d’Etat qui serait à l’origine de cette arrestation.
Peu après la nomination du remplaçant de François Beya, le porte-parole de la présidence, Kasongo Mwema, a d’ailleurs fait la première déclaration officielle sur le sujet. Mais Mwema est resté vague, déclarant simplement que l’ANR disposait d’« indices suffisamment sérieux » soutenant une « menace à la sûreté nationale ».
« Aucune tentative de déstabilisation de nos institutions démocratiques ne sera tolérée », martèle le porte-parole de la présidence.
🇨🇩 FLASH | “Dans l’état actuel des choses, on peut affirmer que les enquêteurs disposent d’indices sérieux attestant d’agissements contre la sécurité nationale”, a Précisé le porte parole du Président de la République, kasongo mwema yambayamba. pic.twitter.com/4TjlqsrjqZ
— LiGABLO (@ligabloOfficiel) February 9, 2022
Coup de balai dans l’appareil sécuritaire ?
Quatre jours se sont écoulés depuis l’arrestation de François Beya. Mais cela fait des semaines que « Fantômas » ne fait plus partie du sérail. En décembre, Jean-Hervé Biosha avait été nommé à la tête de l’ANR, que Beya ne contrôle plus depuis.
L’allié de Beya, ancien patron de l’ANR, Kalev Mutond, a lui aussi été écarté. Lors du dernier Conseil de sécurité en RDC, le 3 février, François Beya n’avait d’ailleurs pas été convié, preuve qu’il semblait être hors-jeu.
En ce qui concerne l’accusation de « déstabilisation », le nombre réduit d’arrestations de responsables laisse penser que, si tentative de coup d’Etat il y a eu, cette dernière n’a pas dépassé la phase de planification.
Quant à l’hypothèse d’une « guerre de palais », la presse estime que « Tshisekedi fait le ménage chez les sécurocrates ». Certains observateurs rappellent l’affaire de la mort mystérieuse de l’ancien patron des renseignements militaires, Delphin Kahimbi, qui se serait suicidé en février 2020 après avoir été démis et interrogé par François Beya. D’autres encore parlent d’une affaire de conflit minier entre Beya et un autre conseiller du président, Fortunat Biselele.
Toutefois, tous rappellent que la proximité entre François Beya et Joseph Kabila est, de loin, la raison la plus probable à la tombée en disgrâce de « Fantômas ».
Quoi qu’il en soit, le journaliste Christophe Rigaud affirme que si François Beya « que l’on croyait intouchable » préparait « un coup de force en RDC », son arrestation devrait « dissuader les putschistes en herbe ». Selon Rigaud, la mise à l’écart de Beya reste politiquement avantageuse pour Félix Tshisekedi, qui a réussi à « reconquérir le pouvoir politique à l’assemblée », à « écarter les possibles rivaux ou gêneurs comme Vital Kamerhe et Jean-Marc Kabund » et à « donner un coup de balai dans l’appareil sécuritaire ».