Lors des premières ventes de diamants de l’année, le plus grand producteur du monde, De Beers, qui travaille notamment sur les marchés botswanais et sud-africain, a agressivement augmenté ses prix. Est-ce une bonne nouvelle pour les pays producteurs ?
Le conglomérat diamantaire sud-africain — pourtant installé à Luxembourg et à Londres — De Beers, du richissime Nicky Oppenheimer, a réussi l’une des augmentations de prix de diamants les plus agressives de ces dernières années.
Profitant d’une demande hors du commun pour les pierres précieuses, De Beers a augmenté les tarifs des pierres de 5 % pour les plus grosses, tandis que les diamants bruts plus petits et purs ont vu leurs prix augmenter de près de 20 %.
Globalement, l’augmentation des prix de vente est estimée à 8 % pour le total des ventes de ce début d’année. Du jamais vu. La plus grande augmentation des prix du diamant avait eu lieu en 2013 et n’avait pas dépassé les 2 %.
Le marché mondial bouleversé
De quoi confirmer, s’il le fallait, la mainmise de De Beers — possédée à 85 % par Anglo American de Nicky Oppenheimer — sur le marché diamantaire mondial. En Afrique, le conglomérat contrôle toute la chaine de production dans les deux premiers pays producteurs du continent et du monde, le Botswana et l’Afrique du Sud.
Pour les spécialistes, cette hausse des prix est sans doute temporaire. Les médias économiques estiment que De Beers ne pourrait pas entrer en guerre avec les autres producteurs concernant le prix mondial des diamants. Si la hausse des prix arrange en théorie tous les producteurs, elle risque de faire des mécontents, des concurrents de De Beers qui verraient leurs clients abandonner les grandes corporations pour des producteurs locaux plus raisonnables aux clients qui boycotteraient l’achat et pourraient même être tentés par la vente. Surtout au vu du bouleversement du marché et de ses implications financières.
Ce qui expliquerait également le silence de De Beers. C’est l’une des rares fois où les grosses ventes de diamants font la une des journaux. Et le conglomérat diamantaire aurait préféré que cette information reste confidentielle. Contactés par Reuters et Bloomberg, les représentants de De Beers ont tous refusé de commenter l’actualité du secteur.
Le Botswana, le perdant de l’histoire ?
Sur le marché des bijoux, l’augmentation des prix risque également de mettre plusieurs grandes marques dans l’incapacité de stocker. Les diamants plus petits ont eu la cote ces dernières années grâce à une offre excédentaire. Mais leur prix a fortement fléchi fin 2021.
Toutefois, les revendeurs comme Bvlgari, Cartier ou Tiffany n’ont pas les stocks nécessaires pour affronter la demande. Et la hausse des prix décidée par De Beers pourrait théoriquement les pousser à acheter au prix fort, ce qui, forcément, aurait un impact néfaste sur leurs bénéfices.
Mais les marques ne sont pas les seules à ne pas gagner au change. Au Botswana, la hausse des prix ne profite que peu à l’Etat.
Pire, si De Beers décide d’augmenter sa production, cela se fera aux dépens des réserves botswanaises. Une telle décision serait perçue par les autorités comme une provocation. D’autant que le conglomérat profite déjà un peu trop de son monopole sur l’extraction de diamants. Les pierres sont en effet souvent vendues à l’étranger, et De Beers ne paie que 15 % de taxes sur ses revenus au Botswana.