Lors d’un discours courageux, hier, le président du Congo-Brazzaville a exhorté les puissances émettrices de carbone à tenir leurs promesses dans la lutte contre le réchauffement climatique.
« Le Bassin du Congo rend au monde des services écosystémiques inestimables. Mais, que reçoit-il en échange ? Hélas, très peu ». Ce lundi, à la tribune de la Conférence de Glasgow de 2021 sur les changements climatiques (COP26), le président congolais Denis Sassou N’Guesso n’a pas mâché ses mots. Porte-parole du Fonds bleu pour le Bassin du Congo, le chef de l’Etat a dit, de façon officielle, ce que tout le monde pense : les puissances occidentales sont actuellement en train de faillir dans la lutte contre le réchauffement climatique, et ce malgré leurs promesses.
Dès 2020, l’Afrique devait recevoir, de la part des pays les plus riches, 100 milliards de dollars annuels. Un minimum lorsque l’on sait que le continent n’est responsable que de 4 % des émissions globales de CO2 et que l’Afrique est le continent le plus vulnérable. Les moyens financiers sont donc primordiaux pour lutter contre le changement climatique. Or, l’Afrique n’a reçu que 70 % à 80 %, tout au plus, des sommes promises par les puissances occidentales.
« Nous avons su prendre nos responsabilités. A chacun désormais d’assumer les siennes »
Comment l’Occident a-t-il pu, à ce point, faillir à ses engagements ? D’autant que la promesse d’aides ne date pas d’hier. « Ces engagements ont été pris il y a plus d’une dizaine d’années. Chaque année, les pays développés repoussent l’échéance à l’année suivante, déplore Aïssatou Diouf, activiste pour le climat. C’est une aberration. Ces 100 milliards de dollars ne sont, pour nous, qu’un point de départ, un plancher, et non un point d’arrivée ». Car en réalité, cette somme est loin d’être suffisante. La promesse non tenue de la part des grandes puissances pose donc un réel souci.
C’est ce qu’a déploré, à la tribune de la COP26, le président du Congo-Brazzaville. L’Afrique doit, a-t-il expliqué en substance, s’adapter au réchauffement climatique qu’elle n’a pourtant pas causé. Malgré tout, les pays du Bassin du Congo — 16 Etats d’Afrique Centrale et de l’Est, ainsi que le Maroc — ont tout mis en œuvre pour sauver le second poumon de la planète. « En prenant la décision de protéger et de conserver le Bassin du Congo pour le bien de l’humanité, nous avons su prendre nos responsabilités. A chacun désormais d’assumer les siennes », a conclu le chef de l’Etat lors de son discours qui a marqué les esprits.
L’importance du Bassin du Congo
Denis Sassou N’Guesso a rappelé à son auditoire les enjeux dans le Bassin du Congo, qui est un « immense massif de forêts et de tourbières qui est aujourd’hui le premier capteur de carbone net de la planète après la déforestation de l’Amazonie ». Avant de rappeler que, « à elles seules, les tourbières de la Cuvette Centrale séquestrent 31 milliards de tonnes de carbone, soit trois années d’émissions mondiales ». Il est donc normal, selon le président congolais, que la place occupée par le Bassin du Congo dans la réalisation des objectifs de l’Accord de Paris soit « absolument incontournable ».
Une intervention offensive, loin des discours habituellement complaisants. Cette fois, Denis Sassou N’Guesso met, face à leurs responsabilités, les puissances émettrices de CO2. S’il a été particulièrement offensif, le président congolais s’est donné comme objectif d’être un porte-parole de la lutte écologique depuis près de trente ans. « Je ne cesse de le répéter sur toutes les tribunes, depuis le Sommet de Rio en 1992, la détermination des pays du Bassin du Congo en général, et celle de la République du Congo en particulier à préserver ce vaste ensemble est totale », a indiqué le chef de l’Etat qui ajoute ne pas vouloir avoir à choisir entre le développement de son pays et la lutte environnementale mondiale. La balle est désormais dans le camp des puissances émettrices de CO2, qui vont désormais devoir tenir leurs promesses, voire les revoir à la hausse dans les années à venir.