A mi-mandat et à deux ans et demi de la prochaine élection présidentielle en RDC, Félix Tshisekedi a annoncé son intention de briguer un nouveau mandat en 2023.
Il a déjoué tous les pronostics. Nombreux étaient les observateurs politiques à ne pas donner cher de la peau de Félix Tshisekedi. Considéré comme l’homme de paille de Joseph Kabila, le président de la République démocratique du Congo s’est, ces derniers temps, extirpé de la tutelle de son prédécesseur. Au point de rêver à un deuxième mandat. Et ce secret de polichinelle n’en est plus un : « Fatshi » se présentera bien devant les électeurs en 2023. Le chef de l’Etat s’est livré à Jeune Afrique, et il répond à la question de sa candidature pour un nouveau mandat.
« J’ai le droit de faire deux mandats, pourquoi m’arrêterais-je en chemin ? J’ai une vision pour ce pays, je veux la concrétiser, explique le président congolais. Si le peuple veut bien m’accorder ce second mandat, je poursuivrai ma mission ». Félix Tshisekedi assure que, s’il est à nouveau élu, il s’agira de son deuxième et dernier mandat. « Après, je passerai la main », explique-t-il.
De l’espoir, mais « il faut transformer l’essai »
Qu’est-ce qui a motivé le président congolais à, déjà, sortir du bois ? A deux ans et demi de la fin de son mandat, « Fatshi » aurait pu attendre encore quelques mois avant de se positionner. Mais à mi-mandat, le président sait que son bilan sera autant porteur d’espoirs que mitigé. Il en est conscient et demande à demi-mots du temps pour lancer des réformes efficaces. « J’ai suscité l’espoir, malgré les circonstances et les bâtons dans les roues. Maintenant, il faut transformer l’essai », affirme-t-il au magazine panafricain.
D’ores et déjà, cette intervention publique est l’occasion pour Félix Tshisekedi de rappeler qu’il a hérité d’un pays où « la corruption, le mensonge, la cupidité ou le vol » étaient des pratiques omniprésentes. « Je ne pensais pas, en toute franchise, que le mal était aussi profond. Il faudra du temps, beaucoup de temps, pour changer cela », promet-il. Un travail de longue haleine pour « mener les travaux d’infrastructure qui nous permettront de relier tous les coins du Congo, capitaliser sur nos minerais, prendre langue avec les investisseurs de ce secteur pour leur faire comprendre que nous voulons un partenariat gagnant-gagnant » ou encore « encadrer notre jeunesse ».
« Fatshi » promet de « détricoter » armée et institutions
Depuis son divorce avec Kabila, Félix Tshisekedi fait cavalier seul. Et pour plaire, plus question de langue de bois. La semaine dernière, en visite dans le nord-est du pays, il a étrillé l’armée et les institutions congolaises. « Il y a beaucoup de magouilles qui minent nos forces de sécurité. Il y a la mafia, cette loi de l’omerta, cette loi du silence, c’est à ça qu’il faut s’attaquer », a notamment déclaré haut et fort le président Tshisekedi, qui n’a pas hésité à évoquer la mafia au Sénat. Et « Fatshi » promet de « détricoter » tout cela.
Si les mots sont importants, en 2023, Félix Tshisekedi sera jugé sur son bilan. Et si le président « détricote », il doit également penser à reconstruire. Parmi les chantiers prioritaires, il y a bien sûr celui de la sécurité. « Je ne serai pas fier de mon mandat, si je ne règle pas définitivement le problème d’insécurité », a-t-il dit lors de son voyage dans le nord-est du pays. Mais il a appelé à la « patience ». Les exemples malien, libyen et tchadien montrent qu’il sera difficile de régler cela en quelques mois.
Des réformes attendues avant 2023
Sur le volet économique, le président doit également faire des avancées significatives très vite. Tshisekedi tente par exemple de remettre à plat les contrats conclus sous Joseph Kabila. Les « contrats chinois » ont coûté cher au pays et n’ont pas apporté les bénéfices escomptés. Le chef de l’Etat a ouvert la porte de la RDC aux Etats-Unis et semble vouloir limiter l’influence chinoise. De l’autre côté, « Fatshi » a demandé que le Congo adhère à la Communauté d’Afrique de l’Est. Il espère ainsi développer les relations économiques avec ses voisins d’Afrique de l’Est. Enfin, il attend impatiemment des voies commerciales avec plusieurs de ses voisins. Mais les chantiers ont pris du retard.
Tshisekedi a encore deux ans et demi pour convaincre l’opinion publique de lui octroyer un deuxième mandat et imposer sa « vision » du pays. Il sait que le chantier qui l’attend est immense, défendant des principes qui sont « la sécurité des populations, surtout dans l’Est, l’amélioration du quotidien des Congolais, la lutte contre la corruption, etc. » « Fatshi » compte sur son « Union sacrée » qui, dit-il, « a été créée pour nous permettre de mener les réformes attendues jusqu’à la fin de mon mandat ».