En n’invitant quasiment aucun chef d’Etat de la Cemac, Paris a montré qu’il ne comptait plus sur une alliance forte avec le Cameroun et le Gabon, entre autres.
Denis Sassou N’Guesso était présent lors du sommet de Paris sur les économies africaines qui s’est déroulé le 18 mai dernier. Un voyage qui, selon le président congolais, « a été l’occasion de présenter les solutions durables à apporter face aux problèmes économiques et financiers auxquels nous sommes tous confrontés dans ce contexte de crise globale liée à la Covid-19 ».
Mais la présence de Denis Sassou N’Guesso est avant tout un mini-événement. Car il était le seul chef d’Etat de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (Cemac) a y être convié, aux côté du Premier ministre tchadien, Pahimi Padacké Albert. Ni Paul Biya, le Camerounais, ni Ali Bongo, le président du Gabon, ni même Félix Tshisekedi, son homologue de République démocratique du Congo n’ont en effet été invités à ce sommet qui se présentait pourtant comme « africain ».
En tout, ce sont dix-neuf chefs d’Etat et de gouvernement du continent qui ont été conviés pour parler finance et économie. Le Cameroun, première économie de la Cemac, n’a que peu goûté d’être snobé par Emmanuel Macron, tout comme la Centrafrique ou encore la Guinée équatoriale.
Mais à quoi est due cette non-invitation ? Selon le journal Africa Intelligence, « seuls les Etats ayant signé la tribune du Financial Times du 25 avril 2020 sur la dette des pays africains étaient invités à l’événement ». Mais les membres de la Cemac sont sceptiques… Car plusieurs autres présidents ont bien participé au sommet alors qu’ils n’avaient pas apposé leur signature au bas de la fameuse tribune. C’est le cas du Nigérian Muhammadu Buhari ou encore du Tunisien Kaïs Saïed.
En réalité, la Cemac paie la nouvelle stratégie de l’Elysée, qui mise un peu plus sur les pays anglophones, comme le Rwanda ou l’Afrique du Sud. Les partenaires si particuliers de la France sont-ils pour autant en disgrâce ? A en croire le rapprochement d’Ali Bongo avec le Commonwealth, il semblerait que les alliances franco-africaines soient effectivement en pleine redistribution des cartes. Africa Intelligence rappelle d’ailleurs que depuis 2017 et son élection, Emmanuel Macron ne s’est rendu dans aucun pays de la Cemac, à l’exception de son allié tchadien.
La colère des pays de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale se comprend, d’autant que les difficultés liées à la crise sanitaire poussent les pays africains à revoir leurs accords économiques avec leurs créanciers.
Autres hypothèses avancées par la lettre africaine, l’arrêt des discussions concernant la fin du francs CFA dans la Cemac et le retard pris sur l’Union économique et monétaire ouest-africaine (Uemoa), dont les membres connaissent une croissance beaucoup plus importante. Ce sont d’ailleurs les dirigeants de l’Uemoa qui ont engagé, en premier, le changement de monnaie unique.