Le dirigeant de la junte tchadienne, Mahamat Idriss Déby, est en visite au Niger. Depuis son arrivée dans la matinée du 10 mai, il s’est longuement entretenu avec le président Mohamed Bazoum. Ce dernier est l’un des représentants du G5 dans la transition tchadienne.
Le nouvel homme fort du Tchad, le général Mahamat Idriss Déby, a commencé lundi sa première visite au Niger. Le président nigérien Mohamed Bazoum est l’un des deux « facilitateurs » désignés par le G5 Sahel pour accompagner la transition tchadienne. La junte de Mahamat Déby a pris les commandes du Tchad le 20 avril dernier, après la mort du président. Le général Mahamat Déby, fils du défunt Idriss Déby, est un général tchadien âgé de 37 ans.
C’est le premier déplacement à l’étranger de Mahamat Déby. Cette visite survient deux jours après une annonce importante du Conseil Militaire de Transition (CMT). Selon les militaires tchadiens, le groupe rebelle FACT, prétendument à l’origine de la mort d’Idriss Déby, serait vaincu. C’était le chef d’état-major de l’armée tchadienne, Abdelkerim Daoud, qui a annoncé la nouvelle. Toutefois, au vu des multiples annonces similaires lors des dernières semaines, celle-ci reste encore à vérifier. Il n’empêche que des dizaines de détenus du FACT ont défilé à N’Djaména avant l’annonce.
Depuis le décès d’Idriss Déby et de la suspension de la constitution par le CMT, les manifestations se sont multipliées dans la capitale tchadienne. Après une médiation internationale, la junte a accepté de mettre en place un gouvernement de transition civil. Cependant, il reste encore du chemin à faire pour les autorités tchadiennes avant d’atteindre l’unité nationale.
La menace terroriste au centre des discussions
Donc, c’est dans ce contexte qu’intervient Mohamed Bazoum, ainsi que son homologue mauritanien. Le Tchad a toujours été considéré comme le pays le plus militarisé du Sahel. Dans la guerre contre le terrorisme, tous les pays du G5 font face à la même menace. Néanmoins, c’est la première fois que le G5S cherche une solution interne à cette menace. Jusque-là, les opérations militaires majeures ont été chaperonnées, voire menées, par les forces françaises de Barkhane et leurs alliés occidentaux.
A la suite de son entretien avec Mohamed Bazoum, Mahamat Déby est parti dans l’ouest nigérien. Il y a rencontré les troupes tchadiennes encore sur le front de la guerre antiterroriste dans la zone des « Trois frontières ». Peu d’informations sont relatées quant aux effectifs tchadiens encore présents au Niger. Cependant, le Tchad avait déployé plus de 1200 soldats dans la région, depuis le dernier sommet G5S. Ces troupes avaient toutefois été rappelées au Tchad au début de l’offensive du FACT. Il semblerait donc que Mahamat Déby considérerait de réaffecter ces troupes au front nigérien.
L’armée tchadienne occupe une place prépondérante, étant relativement bien entrainée et équipée. Le nouvellement élu Bazoum aurait aussi besoin de toute l’aide qu’il peut obtenir face à la menace terroriste. Le Niger a été le théâtre d’une bonne dizaine d’attentats ces derniers mois.
Parmi les sujets imminents, outre la menace de l’Etat Islamique dans le Grand Sahara (EIGS) et en Afrique de l’Ouest (EIAO), la transition tchadienne aurait été abordée. Après la nomination d’un gouvernement de transition, le CMT tchadien considère encore la prochaine étape de la transition.
#Lutte_contre_Terrorisme : Le Président du #CMT, le Gl Mahamat Idriss Deby s’est rendu, ce lundi, à Téra, situé à klk Km de #Niamey. "Il est allé remonter le moral des soldats #Tchad_iens en opération dans la zone des trois frontières" selon la @PresidenceTchad. #Lwili pic.twitter.com/IIE9hXMmXU
— Djakaridia Siribié 🇧🇫 (@Dsiribie) May 10, 2021
Mahamat Déby n’est pas au bout de ses peines
En effet, au-delà des rebelles, le pouvoir des Déby au Tchad est encore contesté. Au niveau politique comme au niveau militaire, Mahamat Déby doit encore composer avec d’éminentes figures. Malgré l’appui français oscillant, et celui de l’Union africaine (UA), le seul outil dans la boite de l’héritier d’Idriss Déby Itno est un marteau. Or, le défunt président traitait avec l’opposition de manières différentes. Certains, comme Baba Laddé, ont conclu des pactes avec Idriss Déby. Il s’agit des opposants issus des autres clans que celui de la famille Déby (zaghawa). Baba Laddé est un chef peul de premier plan, et son influence dépasse le Tchad, jusqu’à toute l’Afrique subsaharienne.
D’autres opposants, comme Yaya Dillo, ont un grand soutien chez les zaghawa. Dillo fait notamment partie de la famille de Mahamat Déby. Son opposition a été traitée comme une trahison familiale par Idriss Déby. Ce dernier aurait utilisé l’armée pour tuer la mère et le fils de Dillo. L’opposant bénéficie aussi d’un large soutien au Tchad comme à l’étranger, de la diaspora.
Ensuite, l’opposition de l’UNDR, avec son chef Saleh Kebzabo, qui a rejoint le nouveau gouvernement, soutenait Yaya Dillo. Albert Padacké, qui a été candidat à la dernière élection contre Déby, a retrouvé son poste de Premier ministre.
Alors, Mahamat Déby doit trouver une façon de calmer les ardeurs des uns, et d’amadouer les autres, s’il veut gouverner le Tchad. Mohamed Bazoum a une grande expérience pour ce qui est des manœuvres politiques internes. Le président nigérien a été élu malgré un grand désavantage ethnique et des affiches électorales roses. Il saurait donc sans doute conseiller au mieux le jeune Mahamat Déby sur les erreurs à éviter.
Le Gvt de Transition, mis en place par décret du président du CMT #MahamatIdrissDeby, le 2 mai dernier, a tenu son premier Conseil des ministres, ce jeudi 6 mai 2021 au Palais présidentiel en présence de tous les membres dudit gouvernement.#IsaacLebonDimanche pic.twitter.com/J2YamAEdeM
— MAHAMAT HISSEINE (@MHISSEINE) May 6, 2021