Ce week-end à Porto, les chefs d’Etat et de gouvernement du Sommet des 27 discuteront de la levée des brevets sur les vaccins anti-Covid-19, pour laquelle les Etats-Unis et l’Europe sont d’accord.
« L’Union européenne soutient la ‘troisième voie’ portée par la directrice générale de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), Ngozi Okonjo-Iweala, pour fournir des vaccins au monde entier ». L’annonce est de Charles Michel, président du Conseil européen. Les chefs d’Etat et de gouvernement aborderont, ce 7 et 8 mai à Port, lors du Sommet des 27, la levée des brevets sur les vaccins contre la Covid-19.
Washington ne serait pas opposée à l’avis de l’Europe : « Il s’agit d’une crise sanitaire mondiale, et les circonstances extraordinaires de la pandémie de la Covid-19 appellent à des mesures extraordinaires. L’administration américaine croit fermement aux protections de la propriété intellectuelle, mais pour mettre fin à cette pandémie, elle soutient la levée des brevets sur les vaccins », a déclaré la représentante américaine au Commerce Katherine Tai.
Depuis le début des campagnes de vaccination sur toute la planète, le nombre de doses administrées dans les pays riches et dans les pays pauvres se creuse inexorablement. Et l’Afrique, fortement dépendante du mécanisme Covax, peine à vacciner. « Si nous ne levons pas aujourd’hui les droits sur les brevets, alors dans quelle autre circonstance le ferons-nous ? », s’est étonné le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, patron de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
L’accord des Etats-Unis pour lever, de façon temporaire, les brevets sur les vaccins anti-Covid serait donc historique. Le directeur général de l’OMS estime que cela favorisera « l’équité vaccinale » et donnera « la priorité au bien-être de tous partout en cette période cruciale ». Reste que les décisions doivent désormais être prises rapidement, et de façon solidaire.
L’industrie pharmaceutique déçue
Mais il faudra, pour les Etats-Unis et l’Europe, accepter le courroux des laboratoires pharmaceutiques, qui détiennent actuellement le monopole des vaccins. Johnson & Johnson, Pfizer ou encore Moderna sont pour le moment restés silencieux. Mais d’ores et déjà, la Fédération internationale de l’industrie pharmaceutique (IFPMA) a indiqué ne pas être « totalement en phase avec l’objectif que les vaccins anti-Covid 19 soient rapidement et équitablement partagés dans le monde ». L’IFPMA juste « décevante » l’annonce américaine et assure qu’« une suspension est la réponse simple mais fausse à un problème complexe ».
Pour l’IFPMA, la suspension des brevets « affaiblira davantage les chaînes d’approvisionnement déjà tendues et favorisera la prolifération des vaccins contrefaits ». Mais au sein de l’Union africaine, et notamment de l’Africa CDC, envisager cette solution est un soulagement. « Nous sommes dans une impasse en tant que continent », expliquait le mois dernier le Dr John Nkengasong, directeur pour l’Afrique des Centres de contrôle et de prévention des maladies, qui affirme que « l’accès aux vaccins a été limité pour nous en tant que continent et cela affecte la manière dont nous déployons notre programme de vaccination ».
Alors que les autorités sanitaires africaines ont pour ambition de vacciner plus 20 % des habitants du continent, avant la fin de l’année, les discussions lors du Sommet des 27 à Porto seront cruciales. Car le temps presse et, après les paroles, il faudra passer aux actes.