Parmi les premiers diplomates choisis par Biden pour représenter son pays, sept ambassadeurs ont été nommés en Afrique. Le Maroc semble être un des grands oubliés de l’Oncle Sam. A cause d’Israël ou du Sahara occidental ?
La Maison-Blanche a fixé sa politique étrangère ce jeudi. Parmi les neuf ambassadeurs nommés, sept seront envoyés en Afrique. Et le Maroc n’est pas invité au bal diplomatique du nouveau président américain. Pourtant, le royaume chérifien entretenait de bonnes relations avec l’administration Trump, cette dernière ayant reconnu la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental contre la normalisation des relations entre Rabat et Tel-Aviv.
Le nombre écrasant de diplomates que les Etats-Unis ont affecté à des ambassades en Afrique n’est pas une surprise. En effet, Biden avait promis à plusieurs reprises l’engagement de son administration envers le continent. La Somalie, Lesotho, le Cameroun, l’Angola, le Sénégal, le Congo-Brazzaville et surtout l’Algérie recevront donc les diplomates de l’administration Biden.
Le Maroc, qui a vu l’ambassadeur américain être rappelé à Washington le 19 janvier dernier, n’est pas sur la liste. Le message est fort : Il y a vraisemblablement de la friture sur la ligne entre Rabat et l’Oncle Sam. Le Maroc aurait-il trop investi diplomatiquement avec l’administration Trump, au risque de déplaire au successeur du sulfureux locataire de la Maison-Blanche ?
L’Algérie plutôt que le Maroc
Car effectivement, Rabat a entretenu des relations très chaudes avec le meilleur ennemi de Biden. Durant les derniers jours de son mandat, Donald Trump avait été le médiateur de la nouvelle amitié entre Israël et le royaume chérifien. Ce triangle amoureux a donné lieu à la reconnaissance par les Etats-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental. S’en est suivi un partenariat historique et très polémique entre Rabat et Tel-Aviv.
La question du Sahara occidental était une décision unilatérale de Donald Trump, certes. Mais, même s’il le voulait, cette décision ne pourra pas être révoquée facilement par Joe Biden. Rassurer le Polisario n’est d’ailleurs pas du tout une ambition affichée par le président américain, qui ne se voit pas rentrer dans ce bourbier diplomatique.
Un autre point semble rendre réticent Biden à nouer des relations avec le Maroc : un accord de vente d’armes conclu entre Israël, le Maroc et trois autres pays, d’une valeur de 23,37 milliards de dollars, énerverait passablement le nouveau locataire de la Maison-Blanche.
Par ailleurs, la fin de la mission de l’ambassadeur américain en janvier annonçait la couleur, d’autant que ce limogeage a été suivi par l’ouverture d’un sous-secrétariat américain dans la ville de Dakhla, le fief historique du Front Polisario.
Enfin, l’élection de Joe Biden a été une mauvaise nouvelle pour Mohamed VI. Le roi du Maroc s’appuyait beaucoup sur le gendre de Donald Trump, Jared Kushner, pour promouvoir sa lune de miel avec Israël. Mais pas seulement : Kushner était aussi un acteur incontournable dans le maintien des relations cordiales entre Mohamed VI et Mohammed Ben Salmane, le prince héritier saoudien.
Les observateurs aguerris ne s’attendaient, certes, pas à ce que ce soit le grand amour entre Joe Biden et le Maroc. Mais les nominations de Biden ressemblent presque à une déclaration de guerre : en mettant le paquet sur la Somalie et le Lesotho plutôt que sur le Maroc, les Etats-Unis donnent une première gifle au royaume. En misant, qui plus est, sur l’Algérie, Joe Biden risque, en plus, de vexer Rabat.