L’ancien président mauritanien Mohamed Ould Abdel Aziz, qui refuse de témoigner devant une commission d’enquête parlementaire, a été placé sous contrôle judiciaire.
Le bras de fer entre le pouvoir mauritanien et l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz se poursuit. Convoqué par une commission d’enquête parlementaire en juillet dernier, Ould Abdel Aziz a toujours refusé de se présenter devant les élus. Pourtant, après plusieurs auditions de cette commission, chargée de faire la lumière sur des faits de corruption et de détournement de fonds publics lors des années de pouvoir de Mohamed Ould Abdel Aziz, le nom de l’ex-président « a été maintes fois directement cité dans le cadre de faits et d’actes pouvant constituer une atteinte dangereuse à la Constitution et aux lois mauritaniennes », affirmait Hbib Ould Diaye, à la tête de la commission d’enquête.
Face au refus de Mohamed Ould Abdel Aziz de se présenter devant la commission, la police de Nouakchott a convoqué l’ex-dirigeant pour l’interroger. Pendant plusieurs heures, et même une nuit, il a du répondre aux questions des autorités, au siège de la Direction générale de la sûreté nationale (DGSN). Une façon pour le président mauritanien actuel, Mohamed Ould El-Ghazaouani, de montrer à son prédécesseur qu’il ne le laisserait pas vivre sa retraite tranquillement.
La justice s’est, ces deniers jours, activée. Un nouveau tournant pour Mohamed Ould Abdel Aziz. Un communiqué du parquet mauritanien affirme en effet que l’ex-chef de l’Etat a été mis sous « contrôle judiciaire poussé ». Un coup de filet important pour la justice, puisque dix autres personnalités, parmi lesquelles deux anciens Premiers ministres, le genre de l’ex-président et des hommes d’affaires, sont également inculpés pour les mêmes motifs. L’enquête financière, poursuit le parquet, a permis de « découvrir, geler et saisir des biens mobiliers et immobiliers provenant de plusieurs crimes ».
En tout, ces biens gelés correspondent à la somme de 100 millions d’euros. Pour le parquet, l’ampleur de la fraude pourrait être bien plus élevée, ces biens n’étant que ceux détectés en Mauritanie. Les fonds provenant de la corruption et exportés dans des pays étrangers n’ont pas encore été découverts. Mais la justice du pays promet de « rechercher et recouvrer par tous les moyens, y compris les facilités offertes par l’entraide judiciaire internationale, des biens frauduleusement acquis ».
Une nouvelle affaire de biens mal-acquis qui devrait faire parler d’elle à l’international. En Mauritanie, l’ancien président Mohamed Ould Abdel Aziz semble être dans de beaux draps. Bonne nouvelle pour lui cependant, il ne devrait pas être placé derrière les barreaux dans l’immédiat. Pas question pour autant de coopérer. Une fois de plus, Ould Abdel Aziz s’est terré dans le silence. « Il a refusé de répondre aux questions du juge, s’en tenant à l’immunité que lui confère la Constitution en son article 93 », précise un avocat de l’ancien chef d’Etat.
En s’acharnant sur son ex-allié par l’intermédiaire de la commission d’enquête, le président mauritanien envoie un message fort, celui de montrer qu’un responsable d’Etat finira toujours par être rattrapé par ses actes, si ceux-ci sont délictueux.