Ce samedi 6 février, Félix Tshisekedi est devenu le président de l’Union africaine. Le chef d’Etat congolais a un an pour atteindre ses objectifs, parmi lesquels la restitution des œuvres d’art africain.
C’est une question hautement sensible sur le continent. 90 % du patrimoine culturel africain se trouve aujourd’hui à l’étranger. Parmi les pays qui détiennent des œuvres africaines, la France. Au moins 90 000 objets d’art d’Afrique subsaharienne seraient dans les collections publiques françaises, principalement au Quai Branly. Plus de la moitié de ces objets sont arrivés durant la période coloniale. En 2017, le président français Emmanuel Macron avait promis le retour de ces œuvres d’art dans leurs pays d’origine.
Il a fallu trois ans pour que l’Assemblée nationale française vote une loi sur la restitution d’œuvres béninoises et sénégalaises datant de la période coloniale. Pour en arriver là, les débats ont été âpres et après plusieurs mois de discussions, le Bénin et le Sénégal ont entrevu le bout du tunnel pour… une trentaine d’œuvres seulement. Autant dire que le chemin est encore long.
« La jeunesse africaine en quête légitime de son identité patrimoniale ».
La faute à une loi qui fait polémique. La loi relative aux musées de France de 2002 indique en effet dans son article 11 que « les biens constituant les collections des musées de France appartenant à une personne publique font partie de leur domaine public et sont, à ce titre, inaliénables ». Autrement dit, il est interdit de céder ces œuvres.
De quoi compliquer la mission des gouvernements africains se sentant spoliés. Lors des discussions sur le projet de loi voté à l’Assemblée nationale en octobre dernier en France, le député Yannick Kerlogot disait comprendre « l’attente et l’engouement des populations concernées », parmi lesquelles la « jeunesse africaine en quête légitime de son identité patrimoniale ».
La restitution des œuvres d’art africain est un sujet aussi bien historique et culturel que politique. Il exacerbe les sentiments nationalistes, notamment pour les objets ayant traversé la mer lors de la colonisation. De diplomatie, le président du Congo devra en faire preuve sans aucun doute.
« Il faut le faire progressivement » (Félix Tshisekedi en 2019)
Car la restitution des œuvres d’art africain est l’un des neuf piliers de la présidence de Félix Tshisekedi à l’Union africaine. Le chef d’Etat congolais a pris les rênes ce samedi 6 février de l’UA. En un an, Tshisekedi espère faire bouger les choses. Et le Congolais connaît bien le sujet. Il militait, il y a deux ans, pour un retour des « trésors du patrimoine artistique congolais » qui étaient exposés au Musée d’Afrique centrale de Tervuren, en Belgique. Ils « devront finalement être restitués au Congo », affirmait-il.
Cette restitution ne doit cependant pas se faire à n’importe quel prix. « C’est une chose de demander la restitution des objets, c’en est une autre de les conserver correctement. L’idée est donc là, mais il faut le faire progressivement », continuait le président de RDC. Ce dernier a désormais un an pour que cette idée devienne réalité.
Lors du 33e sommet de l’Union africaine à Addis-Abeba, début 2020, les chefs d’Etat africains se sont engagés à promouvoir les arts, la culture et le patrimoine. Un « renforcement des échanges intercommunautaires et interculturels sur le continent » a été décidé. « Ces restitutions doivent s’inscrire dans le plan d’action élaboré à ce sujet par l’UA », affirme le Collectif Afrique du Parti communiste français qui demande une intervention de l’Unesco.