La ville de Brandfort, en Afrique du Sud, change de nom et prend celui de Winnie Mandela. Une façon de rappeler que la veuve de Nelson Mandela a elle aussi été le visage de la lutte anti-apartheid.
Après un mariage en 1958 avec Nelson Mandela, Winnie Madikizela s’est rapidement fait un prénom. A l’aube de ses 40 ans, l’épouse du leader du Congrès national africain (ANC) est devenue l’une des figures principales du parti d’opposition au régime de l’apartheid. Si l’engagement de Nelson Mandela est souvent raconté à travers le seul prisme de ce dernier, il est indéniable que Winnie a joué un grand rôle pour changer le cours de l’histoire de l’Afrique du Sud. En 1976, soit quatorze ans après l’arrestation de son mari et quinze ans avant la fin de l’apartheid, Winnie Mandela appelle les lycéens de Soweto à « se battre jusqu’au bout ». S’il luttait de derrière les barreaux, Nelson Mandela a pu compter sur son épouse pour relayer son combat.
« On ne pouvait pas arracher Nelson à son peuple »
C’est d’ailleurs Winnie qui fit de la libération de son mari une cause internationale. Si la jeune femme, de 21 ans à l’époque, avait épousé Nelson par amour, elle avait également épousé la cause. Que ce soit avant son arrestation, pendant sa détention ou après sa libération, c’est la lutte contre l’apartheid qui fut le moteur du couple. Winnie écrivait d’ailleurs dans ses mémoires : « On n’a jamais eu vraiment de vie de famille ». Car, ajoutait-elle, « on ne pouvait pas arracher Nelson à son peuple. La lutte contre l’apartheid, la Nation venaient d’abord ». Winnie avait d’ailleurs elle aussi un pied dans la lutte, parfois de façon radicale. En 1998, la Commission sud-africaine vérité et réconciliation a d’ailleurs jugé que Winnie avait été « coupable politiquement et moralement des énormes violations des droits humains ». Ce que la militante contestera toute sa vie.
Brandfort et l’exil de Winnie Mandela
Indéniablement, Winnie a été une « égérie de la lutte », comme le disait Desmond Tutu. Le prix Nobel de la Paix dira aussi que « quelque chose a mal tourné ». Effectivement, Winnie, à la sortie de prison de son mari, ne sera plus jamais la même. « Mandela nous a abandonnés, l’accord qu’il a conclu est mauvais pour les Noirs », scandera-t-elle haut et fort.
Winnie était en réalité une vraie révolutionnaire. « Mon peuple et moi avons combattu côte à côte face à la violence de l’apartheid, face aux balles, face à la haine », explique-t-elle. En 2017, elle disait, lors d’une interview, toute sa déception sur l’Afrique du Sud et l’ANC : « La réconciliation n’a été qu’une façade », déclarait la Mère de la Nation. Malgré un divorce, en 1996, qui a terni l’image de Winnie, cette dernière reste une figure importante de l’histoire sud-africaine. La « Pasionaria des townships », décédée en avril 2019, vient de donner son nom à la ville de Brandfort, une commune agricole d’un peu plus de 3 000 habitants. Winnie Mandela y avait été envoyée en 1977, en exil. Tout un symbole.