Les transferts de fonds sont souvent indispensables pour les familles africaines. Ils sont aussi un moyen pour que la diaspora investisse dans l’économie africaine. Selon l’Institut Brookings, ces transferts vont baisser de 14 % en 2021.
L’argent envoyé par les migrants aux familles dans leur pays d’origine est une source de revenus incontournable pour des millions de ménages africains. Les envois de fonds vers les pays à revenus faibles ou intermédiaires ont atteint 550 milliards de dollars en 2019, dont 48 milliards rien qu’en Afrique subsaharienne. Un chiffre qui dépasse les investissements directs étrangers et l’aide publique au développement. Et les statistiques réelles sont peut-être encore plus importantes, puisqu’il ne s’agit là que des flux enregistrés. En 2020, ce sont 44 milliards de dollars qui ont été envoyés vers l’Afrique subsaharienne, et le chiffre devrait dégringoler à 41 milliards en 2021.
Des taux de change qui influencent les habitudes
La pandémie de la Covid-19 est l’une des raisons qui explique la baisse continue des flux. Notamment parce que de nombreux bureaux Western Union ou MoneyGram ont dû fermer. Mais cela n’explique pas tout. Les travailleurs migrants subsahariens, en particulier ceux des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à revenu élevé, ont pour certains perdu leur emploi ou vu leurs revenus chuter. Ce qui a considérablement réduit leur capacité à envoyer de l’argent chez leurs proches restés au pays.
La chute des prix du pétrole a également affecté les envois de fonds vers l’Afrique en provenance des pays du Conseil de coopération du Golfe (CCG) de la même manière, bien que le dollar américain se soit mieux porté que l’euro en période de pandémie.
Les taux de change ont également eu une influence sur les flux d’envois de fonds : lorsque les devises d’origine, comme l’euro, se déprécient par rapport au dollar américain, la valeur des envois de fonds en dollars américains diminue, les calculs prenant en compte les dollars. Lorsque la monnaie du pays du bénéficiaire se déprécie, les migrants peuvent envoyer plus d’argent chez eux pour profiter de prix moins élevés, ce qui fait donc augmenter les chiffres.
En Afrique, de nombreux pays pratiquent encore diverses formes de contrôle des devises, ce qui entraîne une divergence entre le taux de change parallèle et le taux de change du marché, et qui provoque un détournement des flux vers des canaux informels et non enregistrés. Là encore, cela fait baisser le bilan des transferts de fonds.
Il en faut peu pour être heureux
Presque 40 % des populations de l’Afrique centrale et du Sahel africain vivent dans une pauvreté extrême. Des efforts des différents gouvernements sont nécessaires pour soutenir les ménages en difficulté, et des efforts internationaux doivent être faits pour maintenir les envois de fonds vers l’Afrique.
Entre la faiblesse des perspectives d’emplois, les restrictions généralisées de voyage et le manque de plus en plus flagrant de fluidité dans les services administratifs, les perspectives ne sont pas réjouissantes. D’autant que, tout en essayant d’imposer des restrictions d’octroi des visas, les pays d’accueil imposent des restrictions qui pourraient empêcher les entreprises d’embaucher des travailleurs étrangers pendant la phase de reprise post-pandémie.
Et si les écarts de revenus, surtout entre l’Afrique et l’Europe, et le changement climatique devraient augmenter considérablement les flux migratoires dans les prochaines années, rien ne garantit qu’ils auront un effet sur les transferts de fonds. Seul le développement des pays Africains, et donc les transferts inter-africains, peuvent provoquer un effet sur le volume des transferts de fonds.
Enfin, un autre frein rend l’avenir des transferts de fonds très flou… En effet, la différence des frais d’envoi entre les pays Occidentaux et les pays africains, qui a atteint les 9 % en 2021, dissuade bien souvent les migrants d’envoyer de l’argent sur le continent. Il s’agit en effet du taux le plus élevé au monde et il est trois fois supérieur à l’Objectif de développement durable pour les frais d’envoi de fonds établi par l’Union africaine.