Le général Abdel Fattah al-Burhane a fait arrêter les civils du gouvernement de transition, au Soudan. Il dit vouloir remettre le pays sur les rails.
En avril 2019, il était celui par qui le grand ménage au Soudan devait passer. Le 11 avril de cette année-là, Omar el-Bechir était renversé par un coup d’Etat après quatre mois de manifestations populaires. Sous la pression civile, l’armée avait décidé de bousculer l’ordre établi. Le général Abdel Fattah al-Burhane devenait alors rapidement l’homme fort du pays. Militaire respecté, il avait annoncé de nombreux limogeages, notamment au sein des services de renseignement.
Au lendemain de la chute d’el-Bechir, Abdel Fattah al-Burhane avait prêté serment, après qu’un autre général, Aouad Ibn Aouf, avait pris la tête du Conseil militaire de transition duquel il avait démissionné, moins de vingt-quatre heures après avoir pris ses fonctions. A la différence d’Ibn Aouf, al-Burhane ne représentait pas le régime el-Bechir. En réalité, il n’avait simplement jamais été sous le feu des projecteurs, mais était bel et bien l’un des hommes forts du dictateur soudanais.
Un homme fort d’Omar el-Bechir
Abdel Fattah al-Burhane est un haut-gradé meneur d’hommes, qui sait se faire respecter. Passé par Pékin, mais aussi par le Yemen, le militaire a un parcours reconnu. Mais en avril, des observateurs le soupçonnaient d’avoir « des liens avec les pays du Golfe ». Cependant, c’est son profil apolitique et son manque de notoriété qui attiraient les spécialistes. D’autant qu’Abdel Fattah al-Burhane n’est pas connu pour être un militaire sanguinaire et aurait même une stature d’homme d’Etat.
S’il est un allié de la junte militaire, le général a souvent montré des signes d’ouverture envers les civils. Mais son duo avec le numéro 2 du Conseil de souveraineté, Mohamed Hamdan Daglo, ne rend pas forcément optimiste : ce dernier commande les paramilitaires des puissantes Forces de soutien rapide (RSF), qui ont été impliquées dans la répression de 2019.
Vers un gouvernement militaire ?
En étant l’homme fort du nouveau putsch au Soudan, le général Abdel Fattah al-Burhane ne change pas profondément le visage de la transition. Sauf qu’il a, avec l’aide de l’armée, fait arrêter les civils faisant partie de la transition, et en particulier le Premier ministre Abdallah Hamdok. S’il a réinstauré l’état d’urgence au Soudan, al-Burhane promet surtout de « corriger le cours de la transition ».
Et au sein de la population soudanaise, le général divise : s’il promet de remettre les civils au centre de la transition, accompagnés forcément d’une forte délégation militaire, pour les manifestants anti-armée, al-Burhane veut au contraire instaurer un gouvernement exclusivement militaire, ce qui ramènerait le Soudan à l’ère d’Omar el-Bechir. Le général assure que, à la fin de l’année 2023, un gouvernement civil verra le jour. Mais d’ici là, le temps est encore long et tout peut changer dans un pays décidément politiquement très fragile.