Autrefois liés uniquement par la coopération dans le secteur du gaz naturel, l’Algérie et l’Italie se rapprochent un peu plus. Explications.
On a rarement vu l’Algérie se rapprocher aussi rapidement d’un autre pays, surtout européen. Une entente rapide est née entre Alger et Rome ces derniers temps. En jeu, des accords dans les secteurs de l’agriculture, de l’énergie, de l’éducation, des infrastructures… mais aussi, selon Africa Intelligence, de la sécurité.
Tout a commencé en octobre dernier, lorsque le ministre algérien des Affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a fustigé les ingérences françaises dans les affaires algériennes, et africaines en général. Il était alors à Rome, où il assistait au troisième sommet Italie-Afrique.
Quatre mois plus tard, la guerre entre l’Ukraine et la Russie a commencé. Si l’Algérie a commencé à négocier de nouveaux contrats de fourniture de gaz naturel liquide (GNL) avec les pays européens, celui conclu avec l’Italie était déjà signé depuis janvier.
Les visites bilatérales se sont succédées. D’un côté, le Premier ministre italien Mario Draghi et le président algérien Abdelmadjid Tebboune, de l’autre leurs ministres des Affaires étrangères — Lamamra et Luigi Di Maio, deux Eurosceptiques. Objectif, donc : intensifier la coopération entre les deux pays.
Mais c’est surtout depuis la réconciliation entre l’Espagne et le Maroc qu’Alger a rendu publics plusieurs détails de son partenariat avec l’Italie. L’Algérie et le Maroc n’étant pas au meilleur de leur relation actuellement, et l’Italie regardant l’Union européenne (UE) avec une méfiance croissante, ce qui était une alliance de circonstance mute rapidement en une amitié stratégique.
Tebboune attendu à Rome le 26 mai
Pour le président algérien Abdelmadjid Tebboune, cette relation n’est que la continuité d’un partenariat historique. « L’Algérie est le premier partenaire commercial de l’Italie dans le continent africain et l’échange entre nos deux pays est en forte croissance », assurait le chef d’Etat algérien lors d’une visite de Mario Draghi à Alger en avril.
Une visite que Tebboune s’apprête à rendre à son homologue le 26 mai prochain. Il s’agira d’abord d’arrondir les angles de l’accord gazier et énergétique entre l’Italienne ENI et l’Algérienne Sonatrach. Un accord qui comprendra, outre l’augmentation du GNL algérien exporté, la vente d’électricité via un nouveau câble sous-marin. Mais aussi le transfert de technologie dans les énergies renouvelables, en l’occurrence l’exploitation de l’hydrogène vert et le captage et stockage de carbone.
La prochaine visite de Tebboune à Rome sera aussi, selon plusieurs sources, l’occasion d’annoncer un nouvel accord en matière de sécurité. Plus précisément, l’Algérie convoite les services du groupe Leonardo S.p.A en matière de surveillance aérienne des frontières et des infrastructures pétrolières.
Pas seulement une question de gaz
Dans une récente interview, l’ambassadeur algérien à Rome, Abdelkrim Touahrieh, a révélé que la coopération italo-algérienne comprendra aussi le tourisme et l’agriculture. Mais pas seulement, car dans le cadre du 4e sommet Italie-Afrique, qui se tiendra en Algérie à partir du 17 juillet, les industriels algériens et italiens discuteront de travaux publics, de production de médicaments, de technologies de la communication…
Si l’alliance italo-algérienne couvre autant de secteurs, elle est aussi un message envoyé au Maroc. Cela étant dit, il n’est pas coutumier pour Alger de se rapprocher aussi rapidement d’un pays occidental. Néanmoins, il semble que les circonstances soient alignées pour une amitié durable entre la Botte et la Mecque des révolutionnaires.
Au bénéfice de l’Algérie, qui cherche un nouveau pied-à-terre européen, mais également de l’Italie qui a longtemps été entravée dans ses relations avec l’Afrique par l’hégémonie française. Aucune gêne pour l’Italie qui, depuis 2016, évoque de plus en plus un « Italexit », à savoir une future sortie de l’Union européenne.