Les représentants de l’ONU en République démocratique du Congo (RDC) ont publié un rapport dans lequel ils contredisent les affirmations de mars de la diplomatie américaine, sur l’appartenance des Forces Démocratiques Alliées (ADF) à Daech.
Dans un rapport publié par l’ONU le 10 juin, un groupe d’experts estime que les deux groupes terroristes ADF et Etat Islamique (Daech), avaient profité des déclarations les liant l’un à l’autre. Il s’agissait d’un communiqué du département d’Etat des Etats-Unis début mars. Dans ce dernier, l’administration Biden classifie les ADF comme « organisation terroriste liée à l’Etat Islamique ». Or, à part un responsable local du Nord-Kivu, personne n’a confirmé cette information.
De plus, une source sécuritaire de la RDC a affirmé au Journal de l’Afrique que les ADF n’ont aucune obédience wahabite. A part quelques commandants locaux, la majorité des ADF en RDC sont des « criminels locaux ». Cette même source accuse l’armée et les ADF d’être « deux parmi tant de parties qui ne cherchent qu’à piller le Nord-Kivu ».
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L’ONU accuse les Etats-Unis
Le rapport récent de l’ONU estime que les déclarations du département d’Etat américain « amplifient la propagande des ADF ». Il ajoute aussi : « Cela suggère une portée mondiale accrue de Daech. Or, aucune preuve ne soutient cette théorie. Ni financièrement, ni humainement ou matériellement ». Selon le même rapport, les bombes utilisées par les ADF ne seraient pas « des outils terroristes ». Mais les ADF les auraient utilisées « à des fins tactiques, offensives ou pour harceler l’armée ».
Cette analyse pourrait être suivie d’autres concernant les ADF. En effet, sur le front mozambicain, des forces européennes sont déjà déployées. Le groupe sécessionniste ougandais violent, dont les origines remontent aux responsables de l’apartheid en Afrique australe, occupe les titres de presse depuis des mois. Néanmoins, son mode opératoire ressemblait beaucoup plus à de la subversion qu’aux attentats terroristes.
Cependant, cette réalité a changé depuis l’offensive de l’armée congolaise en 2019. Et, plus récemment, l’état de siège dans l’Est de la RDC. La retraite des ADF face aux forces congolaises et ougandaises est marquée par des expéditions punitives contre les civils. Non pas que les ADF n’en avaient pas commis dans le passé. Mais la montée de violence est toujours réactionnaire.
Afin d’expliquer le contexte de la dénonciation de ces fausses relations entre les ADF et Daech, l’Etat américain a été évasif. Le rapport diplomatique a été expliqué par « le contre-espionnage au Mozambique et en RDC ». Ainsi que des affirmations du « département d’intelligence Stratégique ».
Les lourdes conséquences de cette dénonciation par le département d’Etat américain sont déjà visibles. Les ADF tuent maintenant beaucoup plus de civils que jamais. Et à part une vingtaine de membres liquidés, l’opération des FARDC est toujours lente et inefficace. La retraite des ADF depuis la prise de leurs fiefs n’a fait que déplacer la menace vers le Sud.
Une atteinte à la crédibilité qui profitera probablement aux ADF en RDC et au Mozambique
Il ne faudrait pas oublier, non plus, que cette action frivole a eu un impact géopolitique et militaire non négligeable. Le président mozambicain Filipe Nyusi a changé sa position quant à l’intervention européenne dans son pays. Ce qui a mobilisé des milliers de soldats européens et mozambicains. Le président de la RDC Félix Tshisekedi a déclaré l’état de siège et déployé l’armée à la place du gouvernement civil dans l’Ituri et le Nord Kivu. Cette décision a entravé la réaction du gouvernement lors de la crise humanitaire de l’explosion du Nyiragongo.
Sans oublier, évidemment, l’atteinte à la crédibilité des renseignements américains. Qui sont partagés sur la question. Si les opérations clandestines confirmaient les liens entre les ADF et Daech, les militaires les niaient. Et même dans les médias, les réactions étaient partagées. Les gros journaux américains ont évité le sujet. Alors que les journalistes de Politico et de RT ont exprimé leurs doutes. Pourtant, les instances africaines ont pris l’assimilation des ADF à Daech pour argent comptant. Les dénonciations de la commission de l’UA étaient anormalement fréquentes.
Avec le rapport de l’ONU, donc, beaucoup de parties seront humiliées. Des médias, aux politiciens, jusqu’à un risque d’annulation des actions militaires dans les zones d’action des ADF. Ces interventions sont toutefois nécessaires. Et leur suspension serait une mauvaise nouvelle pour les millions de Congolais et de Mozambicains menacés par les attaques des ADF.
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