La Conférence épiscopale nationale du Congo a, au terme de sa réunion du 24 février, de mis en doute la compétence et la foi de Félix Tshisekedi. La présidence de RDC a répondu sévèrement à cette déclaration.
La guerre froide qui oppose la présidence congolaise à la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) a franchi un cap. Plus violent. L’heure est désormais aux échanges de scuds.
Après une avoir tenté d’influencer la Cour constitutionnelle dans le scandale qui a touché Justin Luemba, c’est au tour du pouvoir exécutif d’être dans la ligne de mire de l’Eglise. C’est une déclaration, publiée à la sortie de la réunion du 24 février du comité de la CENCO, qui a mis le feu aux poudres. En substance, les autorités religieuses du pays accusent le président Félix Tshisekedi d’être, comme son prédécesseur, un despote corrompu.
Une sortie, pas vraiment divine, qui n’a pas laissé Félix Tshisekedi indifférent. La direction de la communication de la présidence a mis du temps à rétorquer, mais a fini par sortir l’artillerie lourde contre l’Eglise. Elle qualifie en effet la déclaration de la CENCO de « discours aux senteurs politiques » et dénonce « des accointances avec des officines obscures ».
Tschisekedi accuse l’Eglise de populisme
La réponse de la présidence à l’épiscopat catholique, dans un post Facebook daté du 2 mars, n’aura pas manqué d’interpeller. L’Eglise est puissante en République démocratique du Congo, et se la mettre à dos n’est pas vraiment le meilleur calcul politique qui soit.
Qu’importe, la présidence de la RDC a voulu mettre les choses au clair en qualifiant la déclaration des évêques d’« immorale ». Le palais appelle la CENCO à reconsidérer son virage dangereux vers le populisme et son « désir de buzz ». Il rappelle également aux évêques qu’ils ont un statut à respecter, et qu’il n’est pas dans leurs attributions de parler politique.
« Tout ça est digne d’un activisme insurrectionnel et, cerise sur le gâteau, atteste des attitudes partisanes, contraires à leur statut social », a simplement déclaré la présidence.
Pour le direction de la communication du président, cette tentative d’amalgamer Tshisekedi et son prédécesseur, Joseph Kabila, est indigne. « D’où vient alors la peur des princes de l’Eglise ? Une peur dont ils ont du mal à se départir au point d’imputer gratuitement à Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo les relents autrefois accrocheurs décelés » chez son prédécesseur, interroge la présidence qui fait coup double en critiquant également Kabila.
Une simple bataille entre catholiques et évangélistes ?
Mais c’est surtout la passe d’armes entre Eglise et présidence qui détonne, dans un pays où les responsables religieux tentent régulièrement de jouer les arbitres. Cet échange musclé peut aussi ressembler à un match entre catholiques et évangélistes. Félix Tshisekedi est en effet un évangéliste plus qu’assumé. Son directeur de cabinet, Vital Kamerhe, qui serait à l’origine de la réponse musclée au CENCO, est également membre de la célèbre Eglise Philadelphie, du président congolais.
Pendant sa campagne électorale, Félix Tshisekedi a pu s’appuyer sur les plus fervents pentecôtistes, voire les plus virulents, du pays. Bien loin de l’image laïque que le président renvoie à l’étranger. De plus, Tshisekedi est soutenu par le pasteur Alph Lukau en Afrique du Sud ou encore le révérend Sam Ankrah au Ghana.
Alors, quand les responsables religieux se politisent, cela donne un conflit larvé entre les Eglises et le pouvoir. Depuis le début des années 1960, l’Eglise catholique de la RDC s’est imposée comme une opposition farouche aux présidents successifs. Mais aujourd’hui, elle passe la seconde, comme pour prévenir des dangers de l’évangélisme politique…