Des responsables locaux affirment qu’une frappe de l’opération Barkhane a tué 6 civils partis chasser des oiseaux et des lapins dans la région de Gao. Les forces françaises répondent avoir ciblé des terroristes.
Six personnes ont été tuées jeudi 25 mars à l’Est du Mali dans des circonstances encore floues. Les forces françaises avaient déclaré qu’une frappe avait visé des terroristes. Les autorités locales affirment que les morts étaient de jeunes chasseurs.
C’est la deuxième fois au cours des derniers mois qu’une frappe aérienne conduit à des versions aussi opposées. Les six jeunes de Talataye, près de Gao, ont été enterrés le jour-même. Le maire Mohamed Assaleh Ahmad a déclaré à l’AFP que quatre d’entre eux avaient moins de 16 ans et les deux autres avaient entre 18 et 20 ans. Souleymane Ag Almahmoud, un ancien député de la région, a contesté la déclaration des officiers de l’opération Barkhane : « C’est un groupe de jeunes, y compris des mineurs, qui a décidé de passer la journée à l’extérieur du village de Talataye à bord de trois motos et armés d’un fusil de chasse pour tirer sur des lapins et des perdrix », a-t-il déclaré.
« Cette frappe a été ordonnée après une phase de surveillance et d’identification permettant de caractériser la présence d’un groupe terroriste armé », ont rétorqué, dans un communiqué, les membres de Barkhane. Le communiqué parle d’une « frappe aérienne pour neutraliser un groupe armé », indiquant que trois motos ont été détruites, sans mentionner le nombre de personnes tuées.
Les Nations Unies enquêtent actuellement sur une frappe aérienne datant du 3 janvier près du village de Bounti qui, selon les habitants locaux, a frappé une fête de mariage en présence de civils. L’armée française nie ce récit, affirmant que la frappe avait tué « environ 30 combattants ennemis ».
Un problème de souveraineté ?
Les troupes de Barkhane sont déployées dans la région semi-aride du Sahel en Afrique de l’Ouest, où des militants liés à al-Qaïda et aux groupes terroristes de l’Etat Islamique mènent une insurrection croissante contre les armées nationales.
Barkhane est à la recherche d’une stratégie de sortie huit ans après avoir envoyé des soldats pour la première fois intervenir au Mali contre des terroristes, mais le président Emmanuel Macron a exclu le mois dernier une réduction immédiate des troupes dans la région. Il a même promis un financement pour les forces tchadiennes au cours du sommet du G5 Sahel.
Dans la presse malienne, la plupart des opérations unilatéralement menées par Barkhane, surtout vers Gao, sont relatées de façon pour le moins troublante. Peu d’informations sont corroborées par les médias nationaux et internationaux à la fois.
Avec de telles bavures, l’armée française perd peu à peu sa légitimité dans la région. Des membres du gouvernement malien, à l’instar du ministre de la Défense Sadio Camara et du ministre de l’Intérieur Modibo Koné, ont déjà exprimé leur désaccord avec le mode opératoire de Barkhane, qui ne respecte pas la souveraineté du Mali ou les droits des civils.