Ebrahim Raïssi, le président iranien, voyagera au Kenya, en Ouganda et au Zimbabwe. Une mini-tournée historique en Afrique de l’Est.
Kenya, Ouganda et Zimbabwe… Ce mercredi, le président iranien Ebrahim Raïssi commence une mini-tournée africaine. Un véritable événement : cela faisait onze ans qu’un président de la République islamique d’Iran n’avait pas foulé le sol africain. À ses côtés, le président iranien aura le ministre des Affaires étrangères, mais aussi des hommes d’affaires. Pour le chef de la diplomatie iranienne, « il s’agit d’un nouveau départ avec les pays africains ». Et le choix de l’Afrique de l’Est comme destination n’est pas anodin. Téhéran estime avoir une « vision politique commune » avec les trois pays que visitera Raïssi.
Dans un rapport publié en décembre dernier, l’Institut français des relations internationales (Ifri) écrit : « En Afrique de l’Est en général, il convient de souligner la capacité à compartimenter les relations internationales par des dirigeants confrontés à des configurations changeantes de rapports de force à des échelles différentes. En conséquence, de nombreux États africains et du Moyen-Orient ont développé une capacité à surmonter les contradictions en multipliant les partenariats avec des États ayant des relations d’hostilité entre eux, et par ailleurs une sensibilité parfois au tiers-mondisme. Cela expliquerait pourquoi l’Ouganda et le Rwanda, qui ont des relations fortes avec Israël et les Émirats arabes unis, peuvent se montrer ouverts à une détente avec la République islamique d’Iran ».
Des présidents à l’écoute
Rien d’anormal à ce que le Kenya, l’Ouganda et le Zimbabwe soient, comme l’indique le ministre iranien des Affaires étrangères, « très désireux de développer leur relation avec l’Iran » sur les plans économiques et commerciaux. Une liste à laquelle on pourrait également ajouter l’Algérie. Le ministre algérien des Affaires étrangères était à Téhéran le 8 juillet dernier et l’Iran a proposé l’organisation d’une visite d’État à Abdelmadjid Tebboune, le président algérien. Mais concernant l’Afrique de l’Est, la stratégie est inédite : pour une fois, l’Iran se tourne en priorité vers des pays non musulmans. Preuve que la visite d’Ebrahim Raïssi est avant tout diplomatique et économique. Il s’agit aussi pour Téhéran de rompre avec un certain isolement à l’international. L’Iran s’est rapproché de la Russie et de la Chine, a intégré l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS) et Raïssi a effectué une tournée sud-américaine qui l’a emmené au Venezuela, au Nicaragua et à Cuba.
Avec, à chaque fois, un leitmotiv : contrer « les puissances impérialistes », et particulièrement les États-Unis. La visite de Raïssi en Afrique de l’Est est donc stratégique : le président iranien, forcément, va surfer sur la vague anti-impérialiste et pourra compter sur ses trois homologues kényan, ougandais et zimbabwéen pour le comprendre. William Ruto, président du Kenya, a récemment fustigé les désaccords internationaux en affirmant que « les tensions entre Nord et Sud sont tout aussi stériles que celles entre les Occidentaux et la Chine ». Quant à Yoweri Museveni, président d’Ouganda, il avait déclaré il y a un an et demi : « Les Occidentaux doivent arrêter de nous donner des leçons ». Les trois chefs d’État seront donc forcément attentifs à ce qu’Ebrahim Raïssi leur proposera. La visite iranienne s’annonce particulièrement intéressante.