Le chanteur et guitariste guadeloupéen, fondateur du groupe Kassav’, monument de la musique antillaise et créateur du zouk moderne est mort vendredi à l’âge de 65 ans.
Une vie de musique : cinq albums studio, des films, des dizaines de collaborations, des concerts par centaines et, surtout, un style musical propre à sa personnalité… Jacob Desvarieux, le père du zouk moderne, est décédé. Atteint par la Covid-19 et hospitalisé le 12 juillet à Pointe-à-Pitre, l’artiste était diabétique et immunodépressif. Les soucis de santé de Jacob Desvarieux avaient commencé en 2013. Depuis, il avait disparu de la scène musicale.
Monstre sacré du zouk. Guitariste hors pair. Voix emblématique des Antilles. Jacob Desvarieux était tout cela à la fois. Aujourd’hui, le meilleur hommage que nous puissions lui rendre est de continuer à faire vivre son immense talent. pic.twitter.com/CfKEs9LUjq
— Emmanuel Macron (@EmmanuelMacron) July 31, 2021
Néanmoins, le zouk moderne, dont Jacob Desvarieux a été l’un des précurseurs, lui, survivra. L’artiste était bien plus qu’un simple musicien : il a été un messager de paix et de tolérance tout au long de sa carrière. Il avait réussi à mettre un peu d’Afrique dans ses titres. Il a d’ailleurs passé une bonne partie de sa vie sur le continent. C’est surtout à Dakar, la capitale du Sénégal, que Jacob Desvarieux a « africanisé » son art. Cependant, comme il l’expliquait lui-même, c’étaient ses origines qu’il interrogeait à travers sa musique : « Qu’est-ce qu’on faisait là, nous qui étions noirs et parlions français ? », s’interrogeait Jacob Desvarieux lors d’une interview, parlant des Antilles françaises et questionnant, à sa façon, la colonisation.
Ces vidéos de Jacob Desvarieux pendant son confinement sont très touchantes. Rip Monsieur 🙏🏻 pic.twitter.com/9htSLD4D3G
— Diego Perret (@diegoperret86) July 30, 2021
Des hommages venus d’Afrique
Certes, Jacob Desvarieux se produisait dans les pays européens, mais il passait le plus clair de son temps à voyager entre les Antilles et les pays africains. Son retour en Guadeloupe, adulte, fut une quête existentielle. Desvarieux avait passé son adolescence à Dakar, et quelques années ensuite à Marseille, en France.
C’est ensuite à Paris, en 1979, qu’il fonde Kassav’ avec Pierre-Edouard Décimus. Le groupe Kassav’ se réappropria le zouk, une musique au rythme entrainant, dansant, mais aussi, dans le cas de Jacob Desvarieux, très politique : aux musiques festives, il ajoutait des paroles pleines de douleur et de nostalgie. Le groupe Kassav’ fut aussi le premier groupe francophone à signer avec CBS. La légende du jazz, l’américain Miles Davis, avait fait les éloges de la musique de Kassav’.
Desvarieux a également passé beaucoup de temps au Congo. Dans les années 1990, il passait plus de temps du côté de Brazzaville qu’ailleurs. Il s’était d’ailleurs beaucoup produit avec le collectif congolais Bisso Na Bisso, et a même collaboré, sur trois titres, avec les rappeurs Passi et Lino. Il a aussi chanté avec Fally Ipupa et Youssoupha. Et bien que le zouk eût, ces derniers temps, perdu de la splendeur des années 1980 et 1990, l’album « Euphrasine’s Blues », dernier de Desvarieux, s’est vendu par millions.
Les hommages pour le décès de Desvarieux ont afflué du monde entier, surtout de la France. Le président de la République, des ministres et élus ont rendu un dernier hommage au leader du groupe Kassav’. Pourtant, les hommages les plus sincères restent ceux de ses compagnons de route : le chanteur sénégalais Youssou N’Dour a tweeté « Dakar te pleure ». La chanteuse béninoise Angélique Kidjo, le Congolais Fally Ipupa, le footballeur Didier Drogba et l’écrivain Gaël Faye, ont tous pleuré le décès d’une légende.
Fally Ipupa à Jacob Desvarieux : ” Chers grand frère, te rencontrer a été une joie, collaborer avec toi, un honneur. Va en paix “ https://t.co/N5bo2e9tGk
— MBOTE (@mbotecd) July 31, 2021