Au Gabon, ce samedi 26 août a lieu la présidentielle. Mais des législatives et des élections locales. Or, tout a été fait pour que le pouvoir en place ne sorte pas battu. Explications.
On parle beaucoup de la présidentielle, qui a lieu ce samedi 26 août au Gabon. Mais il s’agit d’un jour encore plus important pour le pays : les électeurs choisiront également leur députés, et leurs conseillers départementaux et municipaux. Un calendrier qui a son importance. Car la loi électorale a été plusieurs fois révisée à l’occasion de ces élections générales. Et semble désormais taillée sur mesure pour le clan d’Ali Bongo qui, s’il perdait la présidentielle, conserverait certainement sa majorité au parlement.
Un « bulletin unique » qui favorise le PDG
En effet, plusieurs polémiques ont éclaté, à commencer par la nomination, à la tête du Centre gabonais des élections (CGE), l’organe chargé de l’organisation des élections, de l’ancien ministre, Michel Stéphane Bonda, toujours proche du pouvoir. La modification de la loi électorale pour faire en sorte que l’opposition ait moins de « scrutateurs » dans les bureaux de vote a également beaucoup fait parler. Il sera difficile, surtout en cas de coupures d’internet, de s’assurer de la véracité des résultats.
Mais ce qui a particulièrement cristallisé les critiques, c’est le nouveau « bulletin unique ». Ce dernier a été instauré pour samedi et est, d’ores et déjà, problématique. Car si trois scrutins ont lieu, chaque vote sera interdépendant des autres. En effet, sur le fameux « bulletin unique » figureront les noms du candidat à l’élection présidentielle et d’un député. En substance, les électeurs devront voter pour un député et pour un président du même parti politique. Ce qui pose un gros souci pour les candidats — aux législatives ou à la présidentielle — indépendants.
De quoi faire perdre des voix à l’opposition
L’exemple de l’opposant Anges Kevin Nzigou est flagrant : alors qu’il souhaite être député, étant considéré comme indépendant, s’il vote pour lui il ne pourra pas voter pour la présidentielle. Le candidat du consensus à la présidentielle, désigné par la plateforme d’opposition Alternance 2023, est lui aussi considéré comme indépendant, Albert Ondo Ossa n’appartenant pas à un parti politique. Ceux qui voteront pour lui n’auront donc pas la possibilité de désigner un député, A23 n’ayant pas présenté de listes pour les législatives. Autrement dit, même s’il perdait la présidentielle, Ali Bongo devrait toujours avoir la majorité à l’Assemblée nationale — le PDG, son parti, dispose actuellement de 96 sièges sur 143 possibles.
Après avoir fermé les bureaux de vote pour les Gabonais de l’étranger dans plusieurs pays, le pouvoir a donc bien préparé l’après-26 août. Dans ces conditions, difficile d’imaginer une déroute du PDG. C’est aussi le système démocratique qui est mis en péril. « Le vote de l’électeur doit être libre. Or là, on oblige l’électeur à choisir une fois pour deux candidats. Il vote donc obligatoirement pour un ticket », s’étonne Mike Jocktane, directeur de campagne d’Albert Ondo Ossa, auprès de TV5 Monde. Du côté des militants d’Alternance 2023, l’objectif est de se concentrer sur l’élection d’Albert Ondo Ossa. Mais quelques milliers de voix seront forcément perdues en cours de route à cause de ce système de « bulletin unique ». Et lorsque l’on sait qu’en 2016, Jean Ping a été annoncé perdant à 5 000 voix près, ce détail n’en est pas un.