L’envoyé spécial de l’Union africaine pour les achats de vaccins s’est emporté, jeudi dernier, contre l’Union européenne, qu’il accuse d’être à l’origine du manque de vaccins en Afrique.
Il n’a décidément pas la langue dans sa poche. Envoyé spécial de l’Union africaine pour les achats de vaccins, Strive Masiyiwa avait déjà fustigé, en mai dernier, le Serum Institute of India (SII), le laboratoire indien qui fabrique des vaccins contre la Covid-19. Se disant « en colère », l’homme d’affaires zimbabwéen s’était rappelé, après le retard de livraisons de vaccins, qu’il avait conseillé à l’UA de ne « pas faire affaire avec ces gars-là », qu’il estimait « peu fiables ». C’est fois, c’est l’Union européenne qui s’est attirée les foudres de l’envoyé spécial.
Strive Masiyiwa a en effet estimé que l’Union européenne (UE), et plus généralement le programme international Covax à laquelle l’UE participe, d’être la cause de la pénurie de vaccins sur le continent. Jeudi, le milliardaire zimbabwéen a estimé qu’« il est devenu assez clair en décembre que l’espoir que nous allions tous, en tant que communauté mondiale, acheter des vaccins ensemble par le biais de Covax n’a pas été respecté, en particulier par les nations riches et puissantes ».
Si cette sortie ne surprend personne, le Zimbabwéen reproche surtout à l’Union européenne et Covx d’avoir fait des promesses qu’ils ne pouvaient pas tenir. « La situation aurait pu être très différente si nous avions su dès le mois de décembre que cette aide n’arriverait pas et que nous devions nous débrouiller seuls », a simplement expliqué Masiyiwa pour qui la conséquence de ces promesses a été désastreuse : « De nombreux pays sont restés les bras croisés en se disant que les vaccins allaient arriver… En tant qu’Africains, nous sommes déçus ».
Dans les laboratoires, l’Europe a été prioritaire
En colère et déçu, l’envoyé spécial de l’UA pour les achats de vaccins décrit les raisons chiffrées de son courroux : 400 millions de doses ont été commandées par l’Afrique, qui… ne les a pas encore reçues. En tout, le continent s’est contenté de 61 millions de doses pour 1,2 milliard d’habitants. La faute, selon Masiyiwa, des Européens qui ont été prioritaires. « Lorsque nous nous adressons à leurs fabricants, ils nous disent qu’ils ont atteint leur maximum pour répondre aux besoins de l’Europe, et que nous devons nous adresser à l’Inde », déplore l’homme d’affaires, qui n’est pas en très bon termes avec le laboratoire indien.
On est loin, donc, des 700 millions de doses promises par les partenaires de Covax. L’initiative n’a, pour l’heure, permis que de recevoir 50 millions de doses. Et alors qu’en Europe, la vie reprend son cours, l’Afrique doit composer avec le manque de vaccins.
Mais la colère de Strive Masiyiwa trouve également ses origines dans une autre décision européenne. Lorsque l’UE a décidé de lancer son passeport sanitaire, elle a décidé de ne pas reconnaître les vaccinations par Covishield, un dérivé du vaccin AstraZeneca faisant largement partie de l’initiative Covax. Un double discours qui ne passe pas. Les voyageurs africains sont en effet pénalisés, et l’Union africaine est obligée d’attendre que l’UE revoie sa copie.