Dans le cadre de sa tournée africaine, le président de la Turquie Recep Tayyip Erdoğan s’arrête au Togo ce mercredi 20 octobre. Il y rencontrera le président Faure Gnassingbé.
La visite du président turc, Recep Tayyip Erdoğan, au Togo ce mercredi 20 octobre est la seconde visite d’Etat entre les deux pays, mais c’est la première fois que les présidents des deux Etats vont se rencontrer officiellement. Une visite qui intervient trois mois après celle du ministre turc des Affaires étrangères, Mevlüt Çavuşoğlu, à Lomé, le 20 juillet dernier.
Depuis l’ouverture de l’ambassade turque au Togo, en avril dernier, les relations entre Lomé et Ankara sont au beau fixe. Et pour souligner l’arrivée d’Erdoğan, des drapeaux des deux pays ont été hissés partout dans les rues de la capitale togolaise, qui vit cette visite comme un véritable événement. Si bien que des affiches d’Erdoğan et de son homologue togolais Faure Gnassingbé fleurissent sur des panneaux publicitaires, avec un slogan digne d’une campagne présidentielle : « Ensemble, un monde plus juste est possible ».
La dynastie Gnassingbé n’est pourtant pas vraiment connue pour son amour de l’égalité, de la justice et de l’équité. Mais de plus en plus isolé diplomatiquement, le président togolais profite de cet amour naissant avec la Turquie pour crier haut et fort qu’il a un nouveau partenaire international. Une façon pour « FEG » de briller, après l’échec de sa tentative de réconciliation avec la France en avril dernier.
Faure, entre Turquie… et islamophobie
Les relations entre le Togo et la Turquie se sont dégradées au milieu des années 1980. Eyadéma Gnassingbé, père de l’actuel président, avait été réélu pour un troisième mandat en 1986. Devenu de plus en plus autoritaire, Eyadéma avait été critiqué par l’ancien président turc Süleyman Demirel, qui l’accusait de réprimer systématiquement l’opposition politique, mais surtout les musulmans du Togo.
On se souvient également de la propagande de Faure Gnassingbé contre l’islam et les musulmans en 2017, à l’occasion des manifestations antigouvernementales. Le leader du Parti National Panafricain (PNP), Tipki Atchadam, un musulman du nord togolais qui dénonçait la dictature de Faure Gnassingbé, avait été visé par le régime en place.
Lors des manifestations du PNP, des slogans dénonçaient également la répression des musulmans dans le Nord-Ouest du pays. En contrepartie, Atchadam et ses militants avaient été accusés de promouvoir l’islam politique, voire le terrorisme. Des mots qui avaient plu aux pays occidentaux, surtout à la France, dont Gnassingbé cherchait l’approbation. Les accusations mirent Atchadam sur la touche et ses partisans furent emprisonnés en 2018.
Les péchés du père sont-ils ceux du fils ? Politiquement, cela semble être le cas. Selon une haute source diplomatique, Faure Gnassingbé serait « encore plus islamophobe, et sanguinaire, que son père ne l’a jamais été ».
La France out, la Turquie in
Pour Erdoğan, une présence au Togo est purement géopolitique. Depuis ses échecs dans les dossiers malien, puis tchadien, Faure Gnassingbé est marginalisé par la France. Et alors que les investissements européens au Togo sont au point mort, les échanges avec la Turquie ont atteint 106 millions de dollars en 2019 et 184 millions en 2020.
Grâce à cette dynamique économique, Erdoğan cherche à s’assurer une alliance avec le Togo. Un rapprochement qui garantira au leader turc un pied-à-terre dans la région du Golfe de Guinée. C’est aussi une priorité pour Erdoğan, qui veut, notamment, ébranler l’influence française dans la région. Sans oublier que le Togo est doté de l’un des rares ports en eaux profondes d’Afrique de l’Ouest, idéal pour le commerce turc.
Le ministre togolais des Affaires étrangères, Robert Dussey, a donné ce mardi une interview à l’agence turque Anadolu. Interrogé sur son avis vis-à-vis et sa « reconquête occidentale de l’Afrique », il a fait allusion à la « souveraineté des pays africains ». « Mais il revient à chaque pays de déterminer librement les partenaires et les types de partenariats qui sont les mieux adaptés pour sa situation et qui préservent le mieux ses intérêts, notamment ceux qui peuvent contribuer à son développement et au mieux-être de sa population », explique le chef de la diplomatie togolaise.