Au Gabon, alors que l’opposition se présente unie face à Ali Bongo, lors de la présidentielle, le pouvoir en place met des bâtons dans les roues de la plateforme Alternance 2023.
C’est une véritable guerre d’usure qui a débuté entre le pouvoir gabonaise et l’opposition gabonaise. Ils étaient, il y a encore quelques jours, 19 candidats. Ils ne sont désormais plus que 14. À quelques jours de la présidentielle gabonaise, qui aura lieu le 26 août, plusieurs candidats ont décidé de s’unir derrière Albert Ondo Ossa. La plateforme Alternance 2023 a réussi à obtenir les retraits de personnalités fortes de l’opposition, comme Alexandre Barro Chambrier et Paulette Missambo, tous deux initialement investis par leurs partis respectifs pour être candidats, pour présenter un « candidat consensuel » face à Ali Bongo.
Après 2016, un scénario similaire en 2023 ?
De quoi faire craindre, pour le président gabonais, à un scénario à la Jean Ping en 2016 ? À l’époque, Ping avait obtenu les retraits de Guy Nzouba Ndama, Léon-Paul Ngoulakia, Roland Désiré Aba’a et Casimir Pyé Mba, et avait titillé Ali Bongo. Les résultats officiels montraient alors que Bongo avait battu Ping de 5 000 voix, alors que le taux de participation dans le Haut-Ogooué — près de 100 % — avait choqué les électeurs et montré à quel point les résultats étaient contestables. Sept ans plus tard, le clan Bongo craint une situation similaire. Et a d’ores et déjà lancé les hostilités à l’encontre du candidat d’Alternance 2023.
Absence de bureaux de vote à l’étranger
Depuis plusieurs jours, les médias fidèles au pouvoir tentent de montrer une opposition divisée, là où celle-ci a réussi à s’unir. Mais la panique du clan Bongo a conduit à bien plus qu’une simple bataille de communication. Le Centre gabonais des élections (CGE) a en effet publié la liste des bureaux de vote. Et, surprise, dans certains pays — comme en Turquie et en Côte d’Ivoire —, les Gabonais de l’étranger, généralement en majorité hostiles au pouvoir en place, seront privés de vote. De quoi éviter qu’Albert Ondo Ossa n’engrange trop de voix : en 2016, Jean Ping avait recueilli plus de 58 % des suffrages des Gabonais de l’étranger, contre 37 % pour Ali Bongo.
La loi électorale modifiée in extremis
Si la présidence gabonaise avait organisé, il y a plusieurs mois, un dialogue national censé permettre de revoir les textes, elle a également profité de ces dernières semaines pour mettre toutes les chances de son côté. En modifiant notamment la loi électorale et en imposant deux observateurs du parti au pouvoir, deux candidats de l’opposition et deux indépendants le soir du scrutin dans les bureaux de vote, contre un seul auparavant. De quoi favoriser la grosse machine qu’est le Parti démocratique gabonais (PDG) et pénaliser l’opposition, qui devra donc faire une croix sur la surveillance de plusieurs bureaux de vote et, ainsi, ne pourra pas vérifier tous les procès-verbaux.
Vers des troubles post-électoraux ?
Et d’ici le 26 août prochain, le clan Bongo semble déterminé à mettre d’autres bâtons dans les roues de l’opposition. Une délégation de la plateforme A23, menée par le candidat du consensus Albert Ondo Ossa, s’est ainsi vu refuser de prendre l’avion depuis la ville de Ngounié jusqu’à Lambaréné, l’obligeant à emprunter la route. Autre information troublante : la désignation, ce 16 août 2023, d’un directeur de la sécurité rapprochée du président. Le pouvoir serait-il en train de prévoir, une nouvelle fois, une riposte musclée à une éventuelle contestation de résultats douteux, comme ce fut le cas en 2016 ?