Karim Wade est-il inéligible ? L’opposant à Macky Sall estime qu’il peut désormais se présenter à la présidentielle. Le débat s’annonce vif.
Hier, c’est de Turquie qu’est venue la principale information sénégalaise du jour. Karim Wade s’est en effet inscrit sur les listes électorales depuis Istanbul. Un acte symbolique, première étape à sa potentielle candidature en vue de l’élection présidentielle.
L’an dernier, un rapport d’experts indépendants avait fait beaucoup de bruit. Quatre experts, alors mandatés pour un audit du fichier électoral national, indiquaient que « la permanence de l’exclusion sur les listes électorales pour des délits et crimes commis viole l’esprit de l’article 25 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ».
« À moins d’être condamné à mort, personne ne peut être inéligible à vie, indiquait à l’époque l’un des quatre experts. Le problème, c’est qu’on ne sait pas de quoi on parle. Il y a un flou artistique. En matière électorale, un article de loi doit être clair, les durées d’inéligibilité selon les peines bien définies, afin d’éviter que chacun l’interprète à sa manière ».
C’est sans doute là qu’est le problème actuel : si le principal opposant de Macky Sall, Ousmane Sonko, ne sait pas encore de quoi son avenir sera fait, du côté de Karim Wade, on estime que ce dernier devrait pouvoir se présenter à de futures élections.
La grâce présidentielle ne suffit pas
Car la condamnation de Wade date de 2015. Il avait alors été jugé pour « enrichissement illicite ». L’année suivante, il avait été gracié mais cette grâce n’annulait pas, pour autant, la privation de ses droits civiques. Un cas similaire à celui de Laurent Gbagbo, en Côte d’Ivoire, qui a été gracié mais pas amnistié.
Le Parti démocratique sénégalais (PDS) a cependant lancé une opération de communication avec un objectif : faire admettre par l’opinion publique que Wade est bien éligible. Au moment de sa demande d’inscription sur les listes électorales, Nafissatou Diallo, la porte-parole du parti, a affirmé qu’« il est évident qu’il a recouvré ses droits civiques et politiques. Les peines qui ont été citées dans le code électoral, c’est pour cinq ans, car on ne peut pas déchoir quelqu’un de ses droits ad vitam eternam ».
La porte-parole du PDS s’appuie sur le rapport d’experts de 2021, qui change tout. Car en 2019, le Conseil Constitutionnel avait déclaré Karim Wade inéligible. Une décision contestée par le PDS qui espère que Wade pourra se présenter pour la présidentielle de 2024.
Le débat risque d’être tendu. Mais une décision pourrait cependant faciliter les choses : une amnistie. En septembre dernier, Macky Sall a évoqué cette hypothèse. Le PDS estime qu’il est obligatoire que ce projet se concrétise vite : « C’est le comité des droits de l’homme des Nations unies qui a demandé à ce que l’État du Sénégal révise le procès de Karim Wade, c’est une question de dignité et d’honneur », explique le PDS.