Dans une interview, le ministre congolais des Finances estime que la RDC perd 1 milliard de dollars par an à cause du trafic de minerais. Ce seraient les pays voisins qui profiteraient de la manne.
Ce sont des rapports alarmants que publient, régulièrement, les ONG et l’Organisation des Nations unies (ONU). Tous ont les mêmes conclusions : les minerais congolais disparaissent, à cause notamment de la corruption et, in fine, de la contrebande. Les pertes seraient colossales : un milliard de dollars par an, rien que pour le trafic illégal de minerais, selon le ministre congolais des Finances, Nicolas Kazadi, qui a tiré, cette semaine dans le Financial Times, la sonnette d’alarme.
Le Trésor américain affirme, pour l’or, par exemple, que plus de 90 % de la production congolaise serait envoyée, via des contrebandiers, dans les pays voisins. Le Rwanda et l’Ouganda seraient ainsi les premiers bénéficiaires de l’or congolais.
Le Rwanda plaide non coupable
Une estimation hasardeuse, tant il le trafic est difficilement quantifiable. Mais en comparant la production d’or exportée depuis les raffineries rwandaises et ougandaises, et en la comparant à l’extraction, force est de constater que le différentiel est important.
Ce SOS lancé par les autorités congolaises est également l’occasion d’enfoncer un peu plus le clou de la discorde avec le Rwanda, que Kinshasa accuse donc de pillages. C’est d’ailleurs l’un des enjeux du conflit à l’est de la République démocratique du Congo (RDC) : « Le M23 est en train d’occuper non seulement les voies d’évacuation des minerais mais aussi des axes sur lesquels se trouvent beaucoup de sites miniers », déplorait récemment Alexis Muhima, spécialiste des mines en RDC.
Le ministre congolais en profite pour demander des sanctions contre Kigali. Mais pour le Rwanda, les accusations ne tiennent pas : la porte-parole de la présidence rwandaise, Yolande Makolo, a répondu au ministre congolais que le secteur minier rwandais était conforme aux lois et surveillé, notamment grâce à des techniques de traçabilité.
Les Émirats à la rescousse
Avant la sortie de Nicolas Kazadi dans le FT, le président Paul Kagame avait déjà affirmé que les accusations de pillage de minerais n’étaient « que des histoires inutiles pour détourner les gens du vrai problème ».
Reste que, malgré la défense du Rwanda, la RDC sait que ce sont ses voisins qui profitent des richesses de son sol. En juin 2022, l’Inspection générale des finances avait, dans un rapport, indiqué que les sociétés minières opérant en RDC avaient généré 35 milliards de dollars de bénéfices entre 2020 et 2021, mais n’avaient versé à l’Agence nationale minière que… 564 millions de dollars en commissions.
Kinshasa, qui ne dispose d’aucune raffinerie, s’est tournée vers les Émirats arabes unis. Primera Gold DRC, une joint-venture entre les deux pays, est chargée d’acheter l’or aux mineurs artisanaux congolais et de l’exporter dans le Golfe. Les exportations auraient déjà, en début d’année, été décuplées.