Près d’un mois après l’élection de William Ruto à la présidence du Kenya, la Cour suprême va rendre, lundi, son verdict après des recours déposés par le camp Odinga.
Le Kenya est-il entré dans une longue période de crise politique ? A peine actée, l’élection de William Ruto à la présidence de la République le 9 août dernier a été contestée par l’opposant Raila Amolo Odinga. A la suite de l’annonce des résultats, des manifestations ont eu lieu dans les rues de la capitale. La suspicion d’irrégularités a été alimentée par la démission de quatre des sept membres de la Commission électorale juste avant la publication des résultats. Ces quatre personnalités ont, avant même l’annonce des résultats, indiqué qu’ils rejetteraient ces derniers. Ils parlent d’« opacité » dans le processus de dépouillement.
De quoi donner lieu à une bataille juridique, lancée par le camp de Raila Amolo Odinga. Plusieurs recours ont été déposés devant la Cour suprême. Une requête de 72 pages a été déposée, dans laquelle le camp Odinga assure que plus de 140 000 bulletins n’ont pas été pris en compte. Or, indique la requête, « cela affecte sensiblement les résultats finaux dans la mesure où aucun des candidats n’atteint le seuil constitutionnel de 50 % + 1 voix » pour l’emporter au premier tour. A en croire « RAO », il faudrait donc un second tour pour départager les deux candidats arrivés en tête.
Après 2017, une nouvelle annulation ?
En 2013 et 2017, déjà, Odinga avait déposé des recours devant la Cour suprême, non sans succès. En 2017, la Cour suprême avait en effet invalidé la présidentielle, à cause de plusieurs « irrégularités ». Cette fois, les démissions en cascade au sein de la Commission électorale semblent encore aller dans son sens. Les juges de la Cour ont jusqu’au 5 septembre prochain pour rendre leur verdict. Et le camp Odinga y croit. En cas de jugement en leur faveur, une nouvelle élection devrait se tenir dans les 60 jours.
De quoi inquiéter William Ruto. Si Odinga assure avoir « assez de preuves », le gagnant officiel de la présidentielle tente de mettre K.-O. son opposant en l’accusant de tentative de déstabilisation du pays. Ruto estime qu’Odinga a toujours « systématiquement contesté les résultats de l’élection présidentielle et fomenté des crises nationales après avoir perdu ». L’ex-vice-président estime que l’ancien Premier ministre veut « retenter sa chance par une nouvelle candidature forcée via des moyens judiciaires ».
Si William Ruto se dit impatient de commencer à travailler et estime qu’il est « contre l’intérêt public de garder le pays dans une campagne électorale perpétuelle », c’est surtout parce qu’il sait que la paralysie politique peut perdurer. En 2007, Odinga n’avait pas saisi la Cour suprême. Mais après sa défaite, ses partisans avaient tenté de bloquer le pays. Une crise qui avait provoqué des affrontements inter-ethniques et fait plus d’un millier de morts.
Cette fois, c’est la justice qui devrait trancher. Ce mardi, la Cour suprême a annoncé avoir retenu neuf sujets à examiner parmi les recours déposés. Le piratage du serveur de la Commission électorale ou encore des fraudes pendant le vote seront étudiés par la Cour. William Ruto devra patienter encore trois jours pour savoir s’il est bel et bien le cinquième président du Kenya depuis l’indépendance du pays en 1963.