La grève générale en Tunisie, ce jeudi, a été largement suivie. Un succès pour l’UGTT dans sa bataille avec le président Kaïs Saïed.
Kaïs Saïed, le président tunisien, a voulu contourner l’Union générale tunisienne du travail. La réponse du principal syndicat tunisien a été radicale : la grève générale de ce jeudi 16 juin aurait été suivie par la quasi totalité de ses 750 000 adhérents. La raison du courroux syndical ? Les négociations entre le Fonds monétaire international (FMI) et l’Etat tunisien qui, contre un prêt conséquent, doit promettre à l’institution de Bretton Woods des privatisations et surtout une baisse de 5 % de la masse salariale de l’Etat en trois ans.
Et alors que le FMI demande au gouvernement tunisien que l’accord soit « cosigné par les partenaires sociaux », le palais de Carthage a décidé de publier une circulaire empêchant le syndicat de discuter avec les ministères. Conséquence : l’UGTT a d’ores et déjà affirmé qu’elle refuserait de signer la proposition faite par le gouvernement tunisien au FMI.
Un syndicat toujours influent
Ce jeudi 16 juin devait donc être une véritable démonstration de force. Si l’UGTT est omniprésente dans le secteur public, il s’agissait de savoir si elle était encore capable de mobiliser. Car la centrale syndicale est au centre de nombreuses discussions à Carthage : Kaïs Saïed sait qu’il s’agit de l’un des fleurons du pays — l’UGTT fait partie du quartet qui avait obtenu le prix Nobel de la paix 2015 — mais l’influence politique du syndicat est indéniable et freine les ambitions du président.
Quelles solutions sont-elles envisagées dans les couloirs du palais présidentiel ? Selon plusieurs sources proches du pouvoir, il a un temps été question de dissoudre l’UGTT. Mais la grève générale d’hier montre qu’il sera très difficile de tuer le syndicat. En attendant, c’est l’entourage de Kaïs Saïed qui s’est chargé de faire de la (mauvaise) publicité à la centrale syndicale : depuis plusieurs semaines, les affaires de corruption au sein de l’UGTT ressurgissent. Il est également reproché à l’UGTT de faire de la politique sans être un parti.
Du soutien à l’opposition
L’entourage du président de la République tunisienne a donc tenté de discréditer les actions de l’UGTT, alors que le pays traverse une crise économique sans précédent. Selon l’un des proches du chef de l’Etat, Mezri Haddad, la décision de l’UGTT d’appeler à « une grève générale est une action antinationale qui relève de la haute trahison et de l’atteinte à la sécurité nationale ». La grève générale ayant remporté un sacré succès, Kaïs Saïed sait désormais qu’il marche, avec l’UGTT, sur des œufs.
Reste désormais à savoir si le président remettra l’UGTT au centre des discussions ou s’il continuera à soigneusement mettre à la marge la centrale syndicale. Alors que l’UGTT avait soutenu Kaïs Saïed après le 25 juillet dernier, le président s’est certainement rendu compte qu’il était plus facile de faire de la politique sans une opposition farouche du syndicat. Cette grève générale devrait permettre au président de la République de revoir sa position quant à la centrale syndicale. S’il campe sur sa position, en revanche, l’accord avec le FMI risque de tarder à être signé.