Une délégation de la Cedeao, dirigée par la ministre ghanéenne des Affaires étrangères Shirley Ayorkor Botchway, assure que l’instance sous-régionale « n’abandonnera pas » le Burkina Faso. Pourquoi la Cedeao épargne-t-elle Ouagadougou ?
« Les enjeux et les problèmes qui affligent le Burkina Faso sont aussi nos problèmes. Ce n’est pas en cette période de besoin du Burkina Faso que la Cedeao l’abandonnera », a déclaré jeudi la ministre ghanéenne des Affaires étrangères, Shirley Ayorkor Botchway, en visite à Ouagadougou jeudi et vendredi derniers.
A la tête d’une délégation de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), la diplomate ghanéenne était accompagnée du président de Commission de la Cedeao, l’Ivoirien Jean-Claude Brou. Il s’agit de la première visite de l’instance ouest-africaine au Burkina Faso depuis la publication, début mars, de la feuille de route de transition.
Cette dernière, décidée par les Assises nationales pour la Transition au Burkina Faso, est prévue pour durer trente-six mois. Soit le double de la durée recommandée par la Cedeao. Mais, contrairement au Mali, l’instance ouest-africaine ne semble pas tenir rigueur à la junte du Burkina quant à ce « dépassement » que Shirley Ayorkor Botchway qualifie simplement de « préoccupant ».
La ministre ghanéenne a néanmoins déclaré que le dirigeant militaire du Burkina Faso, Paul-Henri Damiba, lui avait « expliqué son raisonnement ». Une explication qui a semblé suffisante, donc.
Une Cedeao en quête de popularité
Cette souplesse à géométrie variable, de la part de la Cedeao, étonne. Avec les juntes du Burkina Faso comme de Guinée, l’instance sous-régionale fait preuve d’une clémence qui détonne. Fin février, la même délégation, accompagnée par le représentant spécial Mahamat Salah Annadif, avait déclaré « fructueuse et encourageante » sa visite à Conakry. On est loin des déclarations hostiles envers le Mali…
A la différence de ses décisions vis-à-vis de Bamako, la Cedeao s’est contentée de suspendre la Guinée et le Burkina Faso, sans leur imposer d’autres sanctions. Mais qu’est-ce qui explique une telle différence de traitements ? La Cedeao s’est-elle rendu compte de sa chute de popularité, après avoir été fustigée par les sociétés civiles africaines au moment où elle sanctionnait Bamako ? Nul doute que l’attitude de l’instance vis-à-vis du Burkina Faso a pour objectif de redorer son blason au niveau continental.
Mais pas seulement. En mettant certains dirigeants face au mure, tout en épargnant les autres, la Cedeao semble tenter de diviser pour mieux régner. L’instance a beau indiquer que les enjeux sécuritaires, à savoir la menace terroriste qui menace les pays sahéliens, nécessitent des discours adaptés selon les pays, la Cedeao adopte un deux poids, deux mesures incompréhensible.
Alors que le Mali, confronté à un embargo imposé par les pays du bloc, tente de faire face, plusieurs observateurs estiment enfin que la Cedeao suit la ligne imposée par l’Occident, et plus particulièrement par la France. Les images de Shirley Ayorkor Botchway, apparaissant tout sourire aux côtés de Paul-Henri Damiba, montrent en tout cas que l’instance sous-régionale souhaite faire bonne figure, après avoir été totalement à côté de la plaque dans le dossier malien.