La ministre française des Armées, Florence Parly, est au Niger depuis ce mercredi. Elle rencontrera, à Niamey, le président Mohamed Bazoum. Au centre des discussions, « l’évolution du dispositif de Barkhane au Sahel ».
L’opération Barkhane est-elle à court de pays hôtes ? Alors que les forces françaises se font progressivement chasser du Mali, et que s’annoncent quelques complications entre Paris et Ouagadougou à la suite du récent coup d’Etat au Burkina Faso, la ministre française des Armées Florence Parly a posé, hier, ses valises au Niger.
Le ministère français des Armées a annoncé, dans la soirée du 2 février, que la ministre discuterait avec le président nigérien Mohamed Bazoum de « l’évolution du dispositif militaire français au Sahel ». Des discussions qui interviennent de façon imminente à la suite du refus des autorités maliennes de déployer un contingent norvégien de Takuba dans le pays. S’en est suivie une montée des tensions entre Bamako et Paris.
Parallèlement, le récent coup d’Etat au Burkina Faso est, notamment, annonciateur de la fin de la coopération militaire entre la France – et l’Europe en général – et Ouagadougou.
Alors que s’accumulent les facteurs défavorables à la continuité de la présence militaire française au Sahel, la France voit, non seulement, son plan d’« européisation de la lutte antiterroriste », à savoir faire remplacer Barkhane par Takuba, s’enliser. Car concrètement, la présence militaire française subit un rejet total au Sahel, de la part du pouvoir malien en l’occurrence.
Mohamed Bazoum, vassal de la France ?
Dans ce contexte, la France peut désormais déjà se tourner vers son dernier allié sahélien, le président du Niger Mohamed Bazoum. Souvent accusé d’être le vassal de la France, le président nigérien ira sans doute dans le sens de la ministre française. Les chefs d’Etat de la région se font renverser les uns après les autres. Bazoum a, de son côté, déjà subi une tentative de coup d’Etat dès le début de son mandat.
Pendant que le coup d’Etat au Burkina Faso se déroulait, entre le 23 et le 24 janvier derniers, Bazoum craignait de subir le même sort que Roch Kaboré. Il avait, selon une source de la présidence nigérienne, quitté le palais présidentiel de Niamey et s’était installé dans sa résidence privée dans le nord de la capitale, entouré d’éléments des forces spéciales triés sur le volet.
Ainsi donc, le président du Niger craint pour le sort de sa présidence. Une année s’est presque écoulée depuis l’investiture de Mohamed Bazoum, et outre ses nombreuses déclarations dans lesquelles il tacle les militaires des pays du Sahel, ou remercie la France pour son « soutien continu », la gouvernance de Bazoum est plus que douteuse.
Sur le volet sécuritaire, le Niger est plus que jamais paralysé par la menace terroriste, surtout dans le nord et l’ouest du pays. Economiquement, le « décollage » promis par Bazoum se fait encore attendre. Et diplomatiquement, le président nigérien poursuit un agenda de suivisme, loin d’être populaire aujourd’hui, au-delà de sa pertinence.
#Mali : la France “a absolument besoin d’être là pour protéger ses mines d’uranium au Niger” https://t.co/kV2uTmqQlw pic.twitter.com/Ej0QCDlltM
— LCI (@LCI) February 1, 2022
Un engagement conditionné
Du côté français, la visite de Florence Parly à Niamey concerne surtout l’obtention d’assurances au cas où Barkhane se retrouvait bottée hors du Mali. Une possibilité qui se confirme davantage à la suite du renvoi, par Bamako, de l’ambassadeur français au Mali.
L’ancien empire colonial compte aujourd’hui plus de 5 000 soldats au Mali, qui ne sont plus les bienvenus. Pour l’Etat, comme pour les populations, l’intervention française au Mali a été, pour le moins, inefficace, voire contreproductive. Le gouvernement malien, pour plusieurs raisons, cherche aujourd’hui à bâtir de nouvelles coopérations militaires, notamment avec la Russie, pays rival de la France.
Pendant ce temps, le plan de relève de Barkhane, annoncé dans les derniers mois de 2021 par Florence Parly, est au point mort. La coalition formant la force européenne Takuba continue de perdre des alliés. Le retrait du contingent norvégien, annoncé la semaine dernière, suit de près l’abandon de Takuba par la Suède.
De son côté, la secrétaire d’Etat allemande aux Affaires Etrangères, Katja Keul, se rendra également au Mali ce jeudi 3 février. Selon le gouvernement allemand, cette visite au Mali concerne « la manière de la poursuite de l’engagement sur le terrain » de l’Allemagne au Mali.
Un désengagement européen total au Mali, donc, qui confirme l’opinion du Premier ministre Choguel Maïga, qui avait accusé la France d’« abandon en plein vol » du Mali. Les raisons, d’ordre géopolitique, sont encore plus douteuses. Mais quoi qu’il en soit, Paris montre que finalement, son engagement au Sahel est conditionné par une mainmise totale sur les pays « partenaires ».
<< Le départ de la France du Mali est pour bientôt juste une question de jours.
Le président du Niger Mohamed Bazoum partira aussi du pouvoir nigérien. >> Ben le Cerveau pic.twitter.com/eTBPYxIl8L— Imprévisible 🇲🇱🇮🇪 (@Hadji1006) January 31, 2022