Nouveau Premier ministre d’Israël, Naftali Bennett poursuivra-t-il la politique africaine de Netanyahu ? Le soft-power israélien semble en tout cas passer par le continent africain.
Après la guerre des Six Jours en 1967, et encore plus après celle du Kippour six ans plus tard, les relations africaines avec Israël ont été compliquées. L’Union africaine (UA) et, avant elle, l’Organisation de l’unité africaine (OUA) s’étaient majoritairement rangées du côté palestinien, notamment sous la pression de l’Egypte d’Anouar el-Sadate. Depuis, plusieurs pays, comme le Kenya, ont entretenu de discrètes relations avec Tel-Aviv. Jusqu’aux indépendances des années 1960. Après avoir tenté de s’inviter à l’Union européenne, Israël s’était trouvé face à un mur nommé Mouammar Kadhafi. Dix ans après la mort du Guide de la révolution libyenne, l’Etat hébreu s’est, petit à petit, installé sur le continent africain.
Dans la ligne de mire d’Israël, bien évidemment, l’Union africaine reste un objectif. Sous la houlette d’Aliza Bin-Noun, patronne de la direction Afrique du ministère israélien des affaires étrangères, l’Etat hébreu rêve d’une place de choix au sein de l’institution d’Addis Abeba. Poussés par les Américains, le Soudan et le Maroc servent ainsi de faire-valoir à Israël, qui fait des pieds et des mains pour obtenir un siège d’observateur à l’Union africaine.
Si Tel-Aviv venait à obtenir ce siège, ce serait pour Israël la conclusion heureuse d’une politique de rapprochement avec l’Afrique entamée sous Netanyahu. Alors encore Premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu cherchait à étendre l’influence d’Israël aussi bien au niveau commercial que diplomatique. En proposant les services du Mossad à plusieurs Etats africains, dont certains condamnaient pourtant officiellement la politique israélienne envers les Palestiniens, Tel-Aviv s’est mis dans la poche des présidents. Utile pour assurer des débouchés aux sociétés israéliennes de sécurité mais surtout pour s’adjuger des votes supplémentaires en sa faveur au sein des organisations internationales. Comme lorsque le Togo a soutenu Donald Trump lors de la reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël.
Les victoires africaines de Netanyahu
Si le bilan de Netanyahu reste mitigé, l’ex-Premier ministre aura largement fait avancer les relations entre son pays et le continent africain. Censé se tenir en octobre 2017, le sommet Afrique-Israël devait être le point d’orgue de la politique internationale de Netanyahu. Mais le président du Togo, Faure Gnassingbé, avait dû, sous la pression des autres Etats africains et alors que son pays était entré dans une instabilité politique sans précédent, reporter ce sommet, qui n’aura finalement jamais eu lieu.
Pendant ses douze dernières années passées à la primature, Netanyahu n’aura cesser d’œuvrer à la fissuration du bloc africain. Grâce notamment à une alliance économique sans précédent. Pour Steven Gruzd, directeur de la recherche sur les relations Israël-Afrique à l’Institut de relations internationales d’Afrique du Sud (SAIIA), les Etats africains se sont tournés vers le « pragmatisme » israélien, quitte à mettre leur idéologie sous le tapis. Les présidents africains, aujourd’hui, ajoute-t-il, sont « moins imprégnés d’idéologies. Le soutien aux Palestiniens n’est plus aussi fort et unanime qu’avant ».
Netanyahu aura ainsi renoué des relations diplomatiques avec la Guinée et avancé ses pions au Tchad. Il se sera également mis dans la poche le Bénin, le Togo ou encore la Côte d’Ivoire. Enfin, avec l’aide des Etats-Unis, il aura avancé diplomatiquement avec le Soudan et, bien évidemment, le Maroc. Une diplomatie retrouvée avec l’Afrique qui ne devrait pas rompre avec l’idée que se fait le nouveau Premier ministre de la politique internationale.
Mettre fin à l’unanimité africaine contre Israël
Ultra-nationaliste, Naftali Bennett, qui vient de ravir le poste de Premier ministre à Netanyahu, va certainement plus se concentrer sur les affaires internes israéliennes et accélérer le processus de colonisation de la Palestine. Son discours va en tout cas dans ce sens. Mais cette conquête de territoires ne se fera pas sans un soft-power efficace et un lobbying à l’international. S’il veut éviter les résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU, Naftali Bennett devra continuer à gagner du terrain en Afrique.
Le nouveau Premier ministre israélien tentera certainement de poursuivre le travail de séduction entamé par son prédécesseur, passé par le Kenya, l’Ouganda, le Rwanda ou encore l’Ethiopie. L’ex-membre observateur de l’Organisation de l’Unité africaine qu’est Israël compte bien intégrer l’Union africaine. Et cela passera inévitablement par une poursuite de l’offensive diplomatique, économique et sécuritaire initiée par Netanyahu, seule solution à la fin de la « majorité automatique » contre Israël au sein des instances internationales et africaines. Cette stratégie devrait prendre au moins une dizaine d’années. Nul doute que Bennett poursuivra le travail débuté par Netanyahu, dont il est longtemps resté proche.